Deux rapports de la commission de la Défense de l’Assemblée nationale, de fin juillet 2020, et un premier rapport du Sénat, début juillet, ont tiré la sonnette d’alarme sur la dégradation des sociétés de défense, et spécialement les sous-traitants, formant la base industrielle technologique de défense (BITD).
Celle-ci va durement souffrir, à partir de cet automne, étant donné la crise économique et sociale liée à la pandémie de coronavirus. Il faut savoir que la BITD représente 4 000 entreprises (à destination militaire et civile), soit 200 000 personnes. Aussi, les industriels de la défense attendaient beaucoup du plan de relance initié par le gouvernement. Las ! le 3 septembre, le Premier ministre présentait son plan de 100 milliards, qui n’accorde finalement rien pour la défense.
Ou seulement et indirectement au travers des mesures en faveur de la compétitivité des entreprises (35 milliards). Aucune mesure spécifique, aucune nouvelle commande d’équipements pour les forces armées. Le gouvernement use d’une pirouette en mentionnant dans ce plan de relance que des commandes étaient déjà anticipées, notamment dans le plan de soutien aéronautique annoncé en juin (soit 832 millions d’euros) au profit des Armées, mais aussi du ministère de l’Intérieur (pour la Gendarmerie et la Sécurité civile). Même discours au ministère des Armées : le plan de relance pour la défense n’est pas nécessaire, puisqu’il a déjà eu lieu par l’application de la loi de programmation militaire (LPM) qui prévoit que le budget défense bénéficie d’une hausse de 1,7 milliard d’euros par an jusqu’en 2022.
Or, selon le rapport « flash » de la commission de la Défense du 21 juillet, « autant qu’une faute stratégique, ne pas mobiliser l’industrie de défense comme vecteur de relance serait une erreur économique » pour son poids économique comme pour son caractère stratégique. Et de conseiller « qu’il vaut mieux prévenir la perte des capacités industrielles souveraines et critiques que peiner plus tard – souvent en vain – pour la pallier ». Donc, pas de programme ambitieux pour la Marine, pas de nouveau porte-avions à propulsion nucléaire, pas de commande anticipée de Rafale, hors une tranche supplémentaire d’une vingtaine de Rafale « 4T+ ». Voilà une occasion historique ratée, et une industrie de défense qui risque de se trouver dans l’œil du cyclone.
Cela aurait pourtant été un acte fort d’accélérer le remplacement des matériels obsolètes en « poussant » le programme Scorpion (dont les commandes sont inéducables), par exemple, et de combler les nombreux déficits capacitaires.
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