Ainsi, l’ancien commandant militaire américain en Europe de 2014 à 2018, le lieutenant-général (er) Ben Hodges, a lancé un avertissement sévère à Vladimir Poutine : toute frappe contre la Pologne déclencherait une riposte dévastatrice de l’OTAN : « si la Russie attaquait [la Pologne] aujourd’hui de la même manière qu’elle a attaqué l’Ukraine, elle serait détruite par les forces aériennes de l’OTAN et les forces terrestres de l’Alliance. » Il a précisé que les principaux bastions navals russes de Kaliningrad et de Sébastopol seraient parmi les premiers à tomber.

Il a en effet déclaré au média polonais Vok Tak : « soyez certains que Kaliningrad serait détruite dès les premières heures […] Toutes les installations russes seraient détruites. Toutes les installations militaires russes à Sébastopol [en Crimée sur la mer Noire] également. »

Il a aussi affirmé qu’une attaque contre un État de l’OTAN aurait des résultats qui seraient aux antipodes de la « guerre des tranchées » actuelle en Ukraine qui présente des similitudes avec la Première Guerre mondiale.
Il sous-entend par cela que la riposte de l’OTAN serait d’abord des frappes aériennes massives (bombardements, missiles, drones, etc…) de ces deux lieux militaires stratégiques russes placés au nord-ouest et au sud-ouest du dispositif russe.
Il y a certainement dans les cartons de l’OTAN des plans d’opérations tout prêts mis à jour fréquemment en fonction des renseignements nouvellement recueillis, désignant très précisément des objectifs dans ces deux bastions russes. Cela dit, les frappes aériennes non suivies d’exploitation au sol n’ont jamais gagné une guerre sauf si elles étaient nucléaires. Mais à l’époque, le Japon n’avait pas de capacité de riposte au même niveau. La donne a changé.

Le lieutenant-général (er) Andrey Gurulev, ancien commandant adjoint du district militaire sud de l’armée russe de 2016 à 2017 et actuellement membre de la Douma d’État dans le parti présidentiel Russie Unie, a déclaré en réponse à Hodges : « nous devons nous préparer à une guerre majeure. »
Gurulev qui est sous le coup de sanctions américaines et britanniques pour son soutien à l’invasion de l’Ukraine est régulièrement invité dans des talk-shows politiques de la télévision d’État russe où il considéré comme un faucon. Il a notamment plaidé pour des frappes nucléaires sur les pays occidentaux et pour l’« élimination » d’opposants russes.
Il a poursuivi : « l’ancien commandant des forces américaines en Europe a annoncé avec enthousiasme la destruction rapide de Kaliningrad et de Sébastopol. Ce sont des plans de l’OTAN, et ils sont tout à fait réalistes. Ils mènent des exercices, notamment près de nos frontières, pour tenter de détruire Kaliningrad et Sébastopol. Et notre mission est d’empêcher la destruction de Kaliningrad, de Sébastopol ou de toute autre zone peuplée sur le territoire russe. »
Kaliningrad, siège de la flotte russe de la Baltique « doit être une forteresse imprenable…
Cela implique des réserves, des fortifications et des structures de protection pour la population civile […] Cela signifie que nous devons prendre cela très au sérieux. »

Pour lui, les commentaires de Hodges n’étaient pas « une simple déclaration », mais une « menace bien réelle » de l’OTAN.
Il a également rajouté : « Il doit y avoir des plans clairs pour le rattachement de Kaliningrad au reste de la Russie, sans obstacle comme la Lituanie. »
En effet, l’enclave russe n’est reliée à la Biélorussie, pays allié de la Russie, que par le corridor de Suwalki qui, curieusement, n’a pas de route d’accès est-ouest. Les liaisons terrestres se font par la ligne de voie ferrée Moscou-Minsk-Kaliningrad qui passe plus au nord à travers la Lituanie.

Actuellement, Kaliningrad est coupée du reste de la Russie, la majorité des approvisionnements passant par la voie maritime depuis le port de St-Petersburg.
Gurulev a déclaré que les plans pour sauver Kaliningrad « doivent être réalistes, pas comme en 2022, où tout le monde se contentait de dire que tous les problèmes seraient résolus en deux semaines.»
Bien que fidèle au président Poutine, il s’est toujours montré critique vis-à-vis de l’establishment militaire russe qu’il connaît parfaitement de l’intérieur. Il a soutenu le major-général Ivan Popov qui a été limogé et condamné pour corruption alors qu’il critiquait ouvertement la chaîne hiérarchique russe responsable de la guerre en Ukraine qu’il estimait incompétente(1).

Il a ajouté : « L’ennemi se prépare, c’est clairement visible, il se prépare très intensément, il essaie tant bien que mal de réussir. Il est évident qu’aujourd’hui, ses principaux objectifs sont les frappes aériennes à longue portée, y compris les frappes de missiles […] Mes amis, il est de la responsabilité de tout le pays d’être prêt à repousser une attaque. »
Propagande à tout-va du Kremlin
Selon l’expert militaire russe Andreï Klintsevitch et le journaliste Vladimir Soloviev, tous deux considérés comme des propagandistes du Kremlin, une nouvelle guerre mondiale pourrait éclater avec l’utilisation d’un « seul » missile Tomahawk en Ukraine, que Donald Trump a dit qu’il fournirait à Kiev.
Ils affirment que ces missiles peuvent être armés de têtes nucléaires, ce qui techniquement n’est pas faux mais la version idoine « GM-109A Tomahawk Land Attack Missile – Nuclear (TLAM-N) » a été retirée du service il y a plus de dix ans.
Partant de cet argument, la propagande russe avance que l’utilisation du Tomahawk pourrait marquer « le début d’une guerre nucléaire. »
Pour sa part, l’ancien président Dmitri Medvedev connu pour son extrémisme pense qu’il convient de d’abord frapper les sites de stockage et de déploiement des lanceurs nucléaires ainsi que les centres de décision.
La Grande-Bretagne, cible prioritaire ?
La propagande moscovite menace de transformer le Royaume-Uni en une mer appelée le « détroit du camarade Staline » et « d’anéantir cette petite morve britannique incompréhensible. » Il est vrai que l’inimitié – pour ne pas dire plus – entre Londres et Moscou est ancienne.

Pour réussir cette mission d’anéantissement, la nouvelle arme nucléaire sous-marine à grande vitesse Poséidon mise en œuvre par le « cuirassé sous-marin » Belgorod pourrait être utilisée contre le Royaume-Uni (2).

Problème : Jusque là, jamais aucun essai de cette arme révolutionnaire n’a été détecté.
L’ambiance actuelle est pour le moins velléitaire. Il faut espérer que les dirigeants qui détiennent les clefs de l’Apocalypse (ainsi que les verrous de sécurité intermédiaires qui existent) gardent leur calme face à ces déclarations totalement irrationnelles et, dans tous les cas, suicidaires.
(1) Voir : « Pourquoi les forces russes sont si poussives ? » du 25 mars 2025.