Une importante contre-offensive dirigée contre l’occupation ukrainienne de la région russe de Koursk qui dure depuis trois mois aurait débuté. Elle serait plus puissante que celle de septembre engageant environ 50.000 hommes. Kiev affirme qu’un nombre important de troupes nord-coréennes participeraient à cette action.

Selon le colonel-général Aleksandr Syrski, le commandant en chef des forces armées ukrainiennes qui vient d’effectuer une inspection sur zone : « ils exécutent maintenant les ordres de leur commandement militaire en essayant de repousser nos troupes et de pénétrer profondément dans le territoire que nous occupons ». Il a ajouté que l’invasion de la région de Koursk par ses forces avait forcé Moscou à retirer des troupes des combats d’Ukraine : « Sans la résilience de nos soldats, ces dizaines de milliers d’ennemis des meilleures unités de frappe russes prendraient d’assaut nos positions dans les directions de Pokrovsk, Kurakhove ou Toretsk, ce qui aggraverait considérablement la situation sur les lignes de front » (au centre).

Cependant selon le New York Times : « une nouvelle évaluation américaine conclut que la Russie a massé ses forces sans avoir à en retirer de l’est de l’Ukraine – sa principale priorité sur le champ de bataille – permettant à Moscou de faire effort sur plusieurs fronts simultanément ».

Les forces ukrainiennes sont sous pression dans la région de Koursk depuis septembre mais elles sont parvenues à tenir face aux grignotages de l’adversaire qui aurait subi de nombreuses pertes dans ce nouveau « hachoir à viande ».

Un communiqué de la 95ème brigade ukrainienne posté sur Telegram dit : « pendant deux jours d’assaut, l’ennemi n’a rien fait d’autre que détruire ses unités et ses matériels à savoir 28 unités de l’armement ennemi et plus de cent [Russes] de la 810ème brigade de fusiliers marins russes […] Nos parachutistes ont repoussé le désir des Russes de poursuivre l’assaut. Ils ont commencé à battre en retraite, mais tous n’ont pas réussi ».

De son côté, le ministère russe de la Défense a affirmé sur Telegram que son groupement de troupes du Nord « a repoussé six contre-attaques ennemies en direction de Daryino, Nikolayevo-Daryino et Novoivanovka » au nord-ouest de la poche tenue par les Ukrainiens (c/f carte ci-après ; Source Blog Macette Escortert).

a/s les « troupes nord-coréennes » annoncées ?

Un commandant ukrainien a déclaré à CNN le 10 novembre : « les troupes nord-coréennes participaient à des opérations de combat direct à Koursk, ainsi qu’à des opérations défensives dans la région voisine de Belgorod en Russie et dans les territoires ukrainiens occupés par la Russie […] La plupart du temps, les tâches sont définies comme le deuxième échelon de la défense. Dans la région de Koursk, ce sont des opérations de combat direct […] parmi le personnel se trouvaient des artilleurs spécialisés et des tireurs d’élite ».

La même source insiste sur le fait que les troupes nord-coréennes constituent une « ressource importante » pour la guerre de la Russie contre l’Ukraine notant que même celles déployées de manière défensive libèrent les troupes russes pour des opérations d’assaut ailleurs et seraient elles-mêmes éventuellement utilisées dans le combat direct.

Cela dit, au moment où sont écrites ces lignes, aucune preuve tangible de présence de nord-coréens en Russie ou en Ukraine n’a été présentée… Par contre, les rumeurs les plus folles courent : de nombreux militaires nord-coréens seraient morts pour avoir consommé trop d’alcool, certains auraient déserté, etc.

Des doutes dans la stratégie de Kiev

Selon le général de division ukrainien Dmitry Marchenko récemment mis à la retraite interrogé par le journal espagnol El País, la stratégie du général Syrskyi « soulève des questions chez certains militaires qui ne comprennent pas pourquoi des ressources sont dirigées vers la région de Koursk alors que la défense dans le Donbass s’affaiblit […] Peut-être que nos dirigeants ont un grand plan secret, sinon je ne comprends pas pourquoi nos meilleures brigades sont dans la région de Koursk, alors que notre ‘défense’ en Ukraine s’effondre ».
À noter que le général Marchenko était favorable à la candidature de l’ancien chef d’état-major des armées, le général Valeri Fedorovytch Zaloujny, à la présidentielle contre Volodymyr Zelensky. Ce général est aujourd’hui ambassadeur d’Ukraine à Londres.

Et en effet, les troupes russes continuent de progresser doucement dans l’est de l’Ukraine, notamment près de Kurakhove, dans la région de Donetsk.

Selon le collectif ukrainien open source DeepState : « l’ennemi continue de mettre en œuvre son plan à grande échelle pour encercler la ville, en entrant par les flancs […] Comme nous l’avons noté plus tôt, [les Russes], ayant accru la pression de nouvelles directions, tentent de pénétrer dans les voies logistiques des forces de défense, et à partir de ce moment, ce processus ne fait que prendre de l’ampleur ».

Pour contrer l’avancée russe, les Ukrainiens auraient détruit le barrage de Ternivska au nord-ouest de Kurakhove menaçant potentiellement les habitants des agglomérations sur la rivière Vovchii, à la fois dans la région de Donetsk et dans la région de Dnipro. Kiev impute cette action aux Russes. Même les Américains ne s’avancent pas à désigner un coupable…

La Russie augmentant la pression sur le saillant de Koursk tout en gagnant du terrain dans l’est de l’Ukraine, les dirigeants politiques et militaires de Kiev sont confrontés à un choix difficile quant à l’endroit où ils veulent continuer à faire effort.

La Russie va vraisemblablement continuer à tenter de repousser les forces ukrainiennes hors de Koursk tout en poursuivant ses opérations offensives ailleurs sur le front.

Tout cela se déroule dans le contexte d’un changement politique majeur aux États-Unis, principal soutien de l’Ukraine. Le 20 janvier 2025, Donald J. Trump redeviendra président. Alors que le fantasque Trump affirme qu’il peut rapidement mettre fin à la guerre grâce à un plan qu’il n’a pas encore rendu public, certains craignent qu’il n’abandonne l’Ukraine si un tel accord n’est pas accepté par Kiev.

Cependant, la question est beaucoup plus complexe.

Pour Zelensky : « notre opération [dans la région de Koursk] vise à restaurer notre intégrité territoriale […] Nous capturons des terres russes pour les échanger contre des terres ukrainiennes [lors de futures négociations] Nous n’avons pas besoin de leurs terres. » Malheureusement pour Zelensky, alors que les deux parties ont du mal à atteindre leurs objectifs de recrutement, la Russie dispose d’un vivier bien plus vaste dans lequel puiser et régénérer ses forces.

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Texte

Alain Rodier