La Corée du Nord a tiré le 31 octobre l'un de ses missiles avec comme objectif de renforcer sa dissuasion nucléaire, sa première démonstration de force depuis qu'elle a été accusée d'avoir envoyé des milliers de soldats en Russie.

L’armée sud-coréenne « a détecté un missile balistique lancé depuis la région de Pyongyang en direction de la mer de l’Est vers 7H10 », a déclaré l’état-major interarmées sud-coréen, en employant le nom coréen de la mer du Japon.

Ce missile, selon le ministre japonais de la Défense, est un missile balistique intercontinental (ICBM) qui a une portée théorique d’au moins 5.500 kilomètres.

Lancé à un « angle élevé », l’engin a parcouru environ 1.000 kilomètres et atteint l’altitude maximale de 7.000 kilomètres. Au bout de 86 minutes, il serait tombé hors de la zone économique exclusive [ZEE] du Japon, à environ 200 kilomètres à l’ouest de l’île Okushiri [Hokkaïdo].

Le dernier ICBM nord-coréen, baptisé Hwasong-18, a été testé en décembre 2023. Alimenté par du propergol solide et tiré depuis un lanceur routier, il a également été lancé à un angle fortement élevé et a volé pendant 73 minutes, ce qui se traduit par une portée potentielle de 15 000 km sur une trajectoire normale.

Kim Jong Un a déclaré à propos du dernier essai : « le tir d’essai […] répond pleinement à l’objectif d’informer nos rivaux […] de notre volonté de riposter ».

Ce nouveau tir nord-coréen a été « fermement » condamné par la Maison Blanche qui a dénoncé une « violation flagrante » des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU.

L’armée sud-coréenne avait prévenu la veille que le Nord se préparait à tester un missile balistique intercontinental, voire à procéder à un essai nucléaire, peut-être avant la présidentielle américaine du 5 novembre.

L’état-major interarmées sud-coréen a précisé : « Notre armée a relevé son niveau d’alerte et partage étroitement avec les autorités américaines et japonaises les informations concernant le missile balistique de la Corée du Nord, en maintenant un niveau de préparation élevé ».

La Corée du Nord procède généralement aux tirs d’essai de ses missiles les plus puissants et de plus longue portée sur une trajectoire ascendante, c’est-à-dire vers le haut et non vers l’extérieur, pour éviter de survoler les pays voisins. Le ministre japonais de la Défense a déclaré à la presse : « c’était le temps de vol le plus long jamais enregistré [pour un missile nord-coréen] ».

Lin Jian, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères chinois a déclaré : « en tant que voisin proche de la péninsule coréenne, la Chine est préoccupée par l’évolution de la situation dans la péninsule ». Il a assuré que la Chine appelle à la : « résolution politique de la question de la péninsule » » tout en « espérant que toutes les parties feront des efforts pour atteindre cet objectif ».

Les milliers de militaires nord-coréens en Russie.

Le tir nord-coréen a eu lieu quelques heures après que les chefs de la défense des États-Unis et de la Corée du Sud aient appelé Pyongyang à retirer ses troupes de Russie, où, selon Washington et Séoul, quelque 10.000 soldats ont été déployés en vue d’une éventuelle action contre les forces ukrainiennes…

Bien qu’aucune preuve n’ait été présentée publiquement, la nouvelle qui a comme origine Séoul est désormais jugée comme certaine – dans le monde occidental – : plus de 10.000 militaires nord-coréens se préparent à combattre pour le compte de la Russie.

Serguei Kyslytsya, l’ambassadeur ukrainien à l’ONU a réaffirmé le 31 octobre les accusations de Kiev sur la présence de 12.000 soldats nord-coréens en Russie, ajoutant qu’ils devraient « commencer à participer directement aux opérations de combat contre l’Ukraine en novembre ».

Le 1er novembre, l’administration Biden – en pleine campagne électorale – a déclaré qu’environ 8.000 soldats nord-coréens se trouvaient désormais en Russie près de la frontière ukrainienne et se préparaient à aider le Kremlin à lutter contre les troupes ukrainiennes dans les jours à venir. Il s’agit d’une augmentation spectaculaire par rapport à la veille, lorsque le secrétaire à la défense, Lloyd Austin, s’était contenté de dire qu’une « partie » des troupes s’était déplacée vers la frontière ukrainienne dans la région de Koursk. Cela signifierait également que la plupart des troupes nord-coréennes qui ont été envoyées en Russie, se trouvent désormais à la frontière russo-ukrainienne.

Selon Séoul, Kiev et Washington, Kim Jong-un aurait toutes les raisons de fournir à la Russie une « main-d’œuvre » car cela permettra à son armée – qui n’a pas connu de champ de bataille durant 75 ans – de s’entraîner dans un cadre réel en vue d’une guerre future contre la Corée du Sud.

Un responsable du bureau présidentiel sud-coréen a précisé « le fait qu’un nombre aussi important de soldats se soit déplacé vers l’ouest suggère qu’il est peu probable qu’ils soient partis simplement pour observer ».

Pour le ministre sud-coréen de la Défense, Kim Yong-hyun, le déploiement nord-coréen pourrait « entraîner une escalade des menaces pour la sécurité de la péninsule coréenne ».

Il fait craindre aussi une escalade dans le conflit en Ukraine, deux ans et demi après le lancement de l’invasion de l’Ukraine lancée par Vladimir Poutine.

Et c’est peut-être la raison de la diffusion de cette nouvelle reprise en chœur par Kiev et les États-Unis, la Corée du Sud est un important exportateur d’armes qui s’interdit de fournir des pays en conflit. L’implication directe de la Corée du Nord (qui exporte quasi-officiellement déjà des munitions et des missiles vers la Russie) change la donne.

Mais si l’information se vérifie, il se peut que les troupes nord-coréennes posent beaucoup de soucis à leurs alliés russes. Le premier problème est celui de la langue qui va poser d’immenses difficultés de communications entre les Russes et les Nord-Coréens. Le second est le décalage des technologies et des savoir-faire. Enfin, le troisième est le risque de désertions en masse de Nord-Coréens (pour le moment, aucun « déserteur » n’a été présenté au public du côté ukrainien).

Une désinformation ?

S’il s’agit d’une désinformation, cette technique part toujours de quelques faits réels.

Il est tout à fait vraisemblable que des techniciens nord-coréens accompagnent des armements fournis, particulièrement des missiles sol-sol (au moins 1.000 auraient été livrés) pour assurer leur maintenance. Sur le plan opérationnel, nul doute que les stratèges nord-coréens sont intéressés par ce qui se passe en grandeur réelle sur le terrain en Ukraine. Il est donc imaginable que des observateurs – si possible parlant russe – soient invités dans les états-majors sur zone.

En partant de ces éléments réels (mais non prouvés pour l’instant), il suffit ensuite au désinformateur de faire grossir l’information. Ce seraient des milliers de combattants qui s’entraineraient dans l’est de la Russie dont une partie aurait rejoint le front, dans un premier temps la région de Koursk. Ces forces prendraient le relai de troupes russes qui seraient dépêchées sur des zones plus sensibles du front.

Il vient se rajouter un problème : jamais un corps expéditionnaire n’est envoyé sans ses équipements, ses armements et surtout ses véhicules, fussent-ils des camions de transport et au mieux, des véhicules de combat blindés. Pour les acheminer vers Koursk, la voie la plus simple reste le chemin de fer. Pour le moment, les services américains aptes à les détecter et à les filmer par satellites n’ont produit aucun début de preuve…

Les seules photos publiées restent sujettes à interrogations…

Pyongyang, qui n’a pas confirmé ou infirmé la présence de troupes en Russie.

Robert Wood, l’ambassadeur américain adjoint à l’ONU a lâché devant le Conseil de sécurité de l’ONU que les soldats nord-coréens repartiraient « forcément en sacs mortuaires » s’ils entraient en Ukraine pour soutenir la Russie. Il est légitime de s’interroger sur cette déclaration peu « diplomatique » mais c’est oublier que l’ONU n’est pas une organisation vraiment « démocratique ».

Le dernier exemple date du 30 octobre lorsque la quasi-unanimité des pays membres de l’Onu s’est rangée derrière Cuba pour la 32ème année consécutive pour demander la levée des sanctions imposées par Washington depuis soixante-deux ans. Ainsi, 187 pays sur 193 ont approuvé le projet de résolution A/79/L.6 présenté par le ministre cubain des Affaires étrangères intitulé : « Nécessité de lever le blocus économique, commercial et financier imposé à Cuba par les États-Unis d’Amérique ». Les voix « contre » sont celles des États-Unis, d’Israël et de la Moldavie (qui a remplacé l’Ukraine qui avait voté « contre » en 2023 mais « pour » en 2024).

En attendant les premier déserteurs ou prisonniers nord-coréens qui seront présentés à la télévision par les autorités ukrainiennes…

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