Israël a effectué une opération de bombardement baptisée « jours de repentance » sur l’Iran dans la nuit du 25 au 26 octobre 2024.

Cette opération revendiquée officiellement semble avoir eu surtout pour but de délivrer un avertissement à l’Iran pour que ce pays n’aille pas plus loin dans le conflit qui l’oppose via des proxies à l’État hébreu depuis le 7 octobre 2023.

En effet, si ce raid a été important et très complexe dans sa réalisation, les objectifs visés sont restés limités – vraisemblablement à la demande de Washington -.

En échange, les États-Unis ont apporté tout leur appui en dépêchant en Israël leurs propres F-16 pour participer à la défense de l’espace aérien contre une éventuelle riposte.

Ils ont surtout en apporté une aide désignée comme « secrète » par Israël. Il est aisé de deviner que cet appui a porté sur la fourniture de renseignements, le suivi des opérations et même le ravitaillement en vol. En effet, dans ce dernier domaine, Israël n’a pas assez de « citernes volantes » (7 Boeing 707 et 8 KG-46 Pegasus en commande) pour réaliser une telle action qui engage des dizaines d’appareils avec un recomplètement des pleins à l’aller et au retour.

L’opération avait été conçue bien à l’avance et avait permis à Washington de faire une démonstration de force au Yémen le 17 octobre où des avions B-2 venus des États-Unis ont mis en œuvre des bombes anti-bunkers (peut-être des GBU-28 ou 37). Le but n’était pas vraiment de détruire des dépôts souterrains des rebelles Houthis – qui sont limités – mais de montrer aux conseillers iraniens ce que les armes de pénétration US sont capables de faire là et ailleurs… Cinq objectifs auraient été traités.

Bien sûr, ce qui s’est réellement déroulé relève du secret défense mais des observateurs locaux permettent d’analyser quelques éléments de l’opération.

Il y aurait eu trois phases d’action.

La première a consisté à aveugler la défense aérienne iranienne en détruisant des radars de veille en Irak, en Syrie (Sweida), et dans l’ouest de l’Iran.

Une carte montre bien que la Jordanie a dû été survolée à un moment ou un autre pour réaliser ces premières frappes.

l y a eu ensuite deux vagues (initialement, il en avait été annoncé une seule) qui ont ciblé des installations anti-aériennes iraniennes autour de Téhéran et différents complexes militaro-industriels.

Il avait été exclu de frapper des sites pétrochimiques et des sites nucléaires mais pas des usines de fabrication de drones (objectifs secondaires) mais surtout ceux qui fabriquent des missiles balistiques. Entraver durablement la production de ce type d’armements limite la capacité iranienne de lancer des frappes de riposte d’envergure… le combat cessant faute de munitions…

Ainsi, des images satellites révèlent l’étendue des frappes israéliennes sur le site sensible de Parchin situé à 30 kilomètres à l’est de Téhéran. Le complexe « Taleghan 2 », figure parmi les cibles touchées. Les images montrent également la destruction de trois bâtiments liés à la production de mélangeurs de propergol pour les moteurs de missiles.

D’après des responsables israéliens, l’Iran se procure les  éléments nécessaires à l’assemblage de ces mélangeurs en Chine, un processus qui est complexe.

Ces destructions devraient affecter la capacité de l’Iran à produire des missiles balistiques similaires à ceux utilisés lors des attaques contre Israël le 1er octobre.

Bien qu’Israël maintienne une politique d’ambiguïté quant aux dégâts causés sur les 20 cibles frappées, des sources proches du dossier affirment que « des dommages très significatifs ont été infligés aux radars des batteries S-300 déployées autour de Téhéran, ainsi qu’à l’infrastructure de production de missiles balistiques iraniens ».

De son côté, l’état-major général iranien a signalé que plusieurs missiles à longue portée armés d’ogives légères ont été tirés à environ 100 kilomètres des frontières iraniennes. Ces missiles visaient des systèmes radar dans les provinces frontalières d’Ilam et du Khouzestan ainsi que les environs de Téhéran.

L’attaque a commencé vers 2h30 heure locale, les systèmes de défense aérienne iraniens ayant intercepté de nombreux missiles près de Téhéran. Les forces armées iraniennes ont déclaré que, bien que la plupart des missiles aient été interceptés, certains ont causé des « dégâts limités ». Le bilan des victimes des attaques serait de quatre militaires de l’armée régulière.

Les forces armées iraniennes ont affirmé le « droit du pays à prendre des mesures légales et légitimes au moment opportun », tout en soulignant la nécessité d’un « cessez-le-feu durable à Gaza et au Liban ». Toutefois, les observateurs estiment que pour des raisons politiques, il n’y aura pas de riposte directe de Téhéran avant l’élection américaine.

L’Arabie saoudite a été le premier pays à condamner l’attaque sur le territoire iranien, suivie par d’autres membres du Conseil de Coopération du Golfe (CCG), par la Jordanie et l’Égypte. Les États arabes souhaitent clairement éviter d’être entraînés dans ce conflit.

Les leçons vont être tirées par les différentes parties. Mais il semble que l’Iran est considérablement affaibli sur le plan conventionnel n’ayant plus la capacité technique de répliquer d’une manière opérationnelle suffisante.

De plus, la vulnérabilité de son système antiaérien est connue. Son espace aérien est pour un certain temps « ciel ouvert » pour tout agresseur.

Il ne reste à Téhéran que la guerre non conventionnelle menée par ses proxies (Hezbollah et mouvements palestiniens) – qui sont également bien diminués suite à la neutralisation de leurs chefs – et le terrorisme d’État.

Coïncidence, le 27 octobre un bus qui déposait des passagers à un arrêt a été percuté par un camion devant la base militaire de Glilot. Le chauffeur du camion, un Arabe israélien a dévié de sa trajectoire et a heurté le bus et les personnes qui attendaient à la station de bus. Des civils sur les lieux ont tiré sur le conducteur et l’ont neutralisé. Le Hamas s’est « félicité » de cette action (mais ne l’a pas « revendiqué »).

Parmi les 29 blessés, un a succombé à l’hôpital où il avait été transféré.

En Iran, il y a aussi un risque de déstabilisation intérieure qui pourrait mettre le régime des mollahs en danger. Les prochains mois vont être cruciaux pour savoir si Israël est parvenu à son objectif : neutraliser l’Iran.

Publié le

Texte

Alain Rodier