Un incendie a été déclaré dans une des deux tours de refroidissement de la centrale nucléaire de Zaporijjia (Zaporizhzhia) le 11 août. L’Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) qui maintient une équipe de surveillance sur place, a déclaré que ses experts avaient constaté une « forte fumée noire » provenant de la centrale à la suite de « multiples explosions ». Elle a ajouté que la direction de la centrale avait signalé « une attaque présumée de drones » sur l'une des tours de refroidissement du site. Par contre, « aucun impact n'a été signalé pour la sécurité nucléaire ».

L’AIEA a effectué une première inspection des lieux le 13 août matin qui devra être complétée quand les conditions de sécurité des opérateurs seront assurées.

Vladimir Rogov, un des responsables de la centrale mis en place par Moscou a déclaré lendemain matin que l’incendie avait été « complètement éteint ».

La centrale nucléaire est sous le contrôle des troupes et des responsables russes depuis 2022.

Elle n’a pas produit d’électricité depuis plus de deux ans et ses six réacteurs sont tous en arrêt à froid depuis avril 2024.

Les deux tours aéroréfrigérantes, situées à un peu plus d’un kilomètre des réacteurs ne contiennent pas de matière radioactive. Elles permettent le refroidissement non pas des réacteurs mais des circuits d’eau de refroidissement liés au condenseur. C’est exclusivement dans la partie conventionnelle sans lien direct avec la partie nucléaire (voir schéma ci-après).

Le président ukrainien Volodimir Zelenski a déclaré qu’il n’y avait pas de pic de radiation détecté ni de danger de fuite nucléaire – mais a accusé la Russie d’avoir délibérément déclenché l’incendie pour tenter de « faire chanter » Kiev. Plusieurs observateurs ont avancé l’hypothèse d’un feu de pneus volontairement lancé dans une des deux tours.

Mais Yevgeny Balitsky, le gouverneur de Zaporijjia mis en place par le Kremlin, a déclaré que deux drones ukrainiens avaient provoqué l’incendie tout en appelant au « calme » car il n’y avait pas eu de pic de radiations autour de la centrale.

Cet incident survient alors que les troupes ukrainiennes ont lancé leur offensive sur Koursk.

Comme d’habitude, la guerre de l’information fait rage. Toutefois, techniquement parlant, un bombardement d’une tour de refroidissement d’une centrale nucléaire à l’arrêt ne présente pas d’intérêt stratégique utile puisqu’elle ne fonctionne plus, l’évacuation de l’énergie résiduelle des réacteurs arrêtés pouvant être assurée par le bassin de refroidissement qui est approvisionné par les eaux du fleuve Dniepr.

Ces tours sont en béton armé et il faudrait une grande quantité d’explosif pour les fragiliser. Enfin, rien d’inflammable à leur base ne peut expliquer l’importante fumée noire qui a été filmée.

En visitant la tour de refroidissement impactée dès le lendemain, l’équipe de l’AIEA a observé des zones brûlées dans l’équipement interne près du niveau de distribution des buses d’eau. Ils ont également observé des gouttelettes de plastique brûlé et des fragments de béton tombés répartis sur le bassin d’eau froide. L’équipe a estimé que ces gouttelettes étaient compatibles avec le maillage plastique fondu et tombé de l’incendie. L’odeur persistante du feu a été évaluée par l’équipe et a déterminé qu’en l’absence d’odeur de soufre, était plus probablement causée par la combustion du plastique.

Ni les restes de pneus ni de drones n’ont été observés pendant la visite.

Conclusion provisoire : « l’équipe n’a pas été en mesure de tirer des conclusions définitives sur la base des conclusions et observations formulées jusqu’à présent ».

L’AIEA poursuivra son analyse globale après un examen et un accès supplémentaires au niveau de distribution des buses d’eau et au bassin d’eau froide.»

Pour en savoir plus, il faudra attendre une inspection plus poussée dès que les conditions de sécurité seront établies.

Enfin pour conclure : « porter atteinte délibérément à une infrastructure énergétique civile (spécialement des barrages ou des centrales nucléaires) au risque de causer un accident grave est contraire à l’article 56 de la Convention de Genève…

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Texte

ALain RODIER