L’US Air Force a annoncé avoir procédé au lancement d'un missile de croisière hypersonique AGM-183 ou ARRW (Air-Launched Rapid Response Weapon) de Lockheed Martin en début de semaine. Un bombardier B-52H ayant décollé de la base d’Andersen sur l’île de Guam a tiré le missile après un parcours de 4.000 kilomètres.

C’est la première fois qu’un missile hypersonique américain est lancé dans cette région. Cet essai est un signal adressé à Pékin.

Missile AGM-183A ou ARRW sous l’aile d’un bombardier B-52H à la base aérienne d’Andersen à Guam le 27 février 2024. USAF

L’essai a eu lieu sur réceptacle de tir « Reagan » après un décollage depuis la base aérienne d’Andersen, Guam, le 17 mars 2024.

Le réceptacle de tir « Reagan » comprend diverses installations réparties sur plusieurs îles de l’atoll de Kwajalein en République des îles Marshall. C’est là que l’armée américaine teste des  munitions à très longue portée dont des missiles Minuteman III lancés depuis la base aérienne de Vandenberg en Californie.

La base aérienne d’Andersen à Guam est la plus importante à accueillir des bombardiers à long rayon d’action dans le Pacifique.

En cas de conflit majeur dans la région (Chine ou/et Corée du Nord), elle devrait jouer un rôle central.

Les armes hypersoniques américaines, qui devraient être très coûteuses et acquises en nombre relativement limité, seraient particulièrement précieuses dans une lutte haut de gamme pour mener des frappes conventionnelles contre des cibles de très forte valeur et fortement défendues permettant d’éviter un engagement nucléaire tactique que certains experts réclament.

L’US Air Force reste très discrète sur les résultats de ce test se contentant de faire la déclaration suivante :  «… ce test a acquis des données précieuses et uniques et visait à faire plus d’une gamme de programmes hypersoniques. »

Depuis 2021, l’US Air Force a procédé à plusieurs essais d’AGM-183A dont les trois derniers ont eu lieu en décembre 2022, mars puis octobre 2023. Celui de mars aurait connu un échec.

Toutefois, selon le général Dale White, l’adjoint militaire du Bureau du Secrétaire adjoint de l’armée de l’air : « À l’heure actuelle, nous n’avons pas l’ARRW dans le budget de l’année fiscale […] Les décisions de l’ARRW sont en attente d’une analyse finale de toutes les données d’essais en vol. »

Après des années d’essais aux résultats mitigés, l’US Air Force avait en mars 2023 qu’elle prévoyait de mettre fin au programme ARRW et de transférer les ressources sur un autre type d’arme hypersonique, le missile de croisière hypersonique d’attaque (HACM).

Dessin d’un missile de croisière hypersonique de Raytheon, le maître d’œuvre du programme HACM

Le missile HACM est plus petit que l’ARRW et peut armer des chasseurs-bombardiers. L’ARRW était lui si imposant qu’il ne pouvait être transporté que par des bombardiers lourds. Il est possible qu’étant donnée sa taille plus réduite, le HACM doit avoir une portée plus réduite. Mais la pratique de la guerre moderne a montré que tous les avions ne seront pas en mesure de s’approcher d’un territoire contrôlé par les systèmes de défense aérienne modernes. Un missile à plus longue portée est un avantage certain.

Quoi qu’il en soit, l’armée de l’air a achevé l’essai final de bout en bout d’un missile ARRW, qui, selon elle, éclairera ses futurs plans d’armes hypersoniques.

Cette arme pourrait atteindre la vitesse maximale de Mach 20, sa portée étant estimée à 1.600 kilomètres.

Les premiers vols hypersoniques avaient été réalisés à la fin des années 1950. Alors que les missiles balistiques d’aujourd’hui entrent dans l’atmosphère à Mach 18, les nouvelles armes hypersoniques volent à environ la même vitesse mais entièrement dans l’atmosphère. Cela les soumet à des niveaux incroyables de friction et de pression de l’air qui n’étaient pas entièrement maîtrisés jusqu’à récemment.

Comme par hasard, après que le test américain ait été rendu public, l’agence d’État nord-coréenne KCNA a été annoncé que le suprême leader Kim Jong Un avait supervisé l’essai réussi d’un moteur à combustible solide pour un « nouveau type de missile hypersonique de portée intermédiaire. »

Le test aurait été mené le 19 mars sur le site de lancement de satellites de Sohae, dans le nord-ouest du pays. Il s’agissait d’« un essai au sol de moteur à combustible solide pour un nouveau type de missile hypersonique de portée intermédiaire. »

Publié le

Texte

Alain Rodier