Pour beaucoup, les retours d’expérience de la guerre en Ukraine n’allaient pas manquer d’influencer en profondeur la prochaine loi de programmation militaire (LPM) 2024-2030. En effet, selon les déclarations du président Emmanuel Macron lors de ses voeux aux armées le 20 janvier dernier, les 413 milliards d’euros du budget à la Défense vont "transformer" les armées.
Et cela, grâce à quatre pivots : le renforcement de la dissuasion ; la préparation à la haute intensité ; la protection des intérêts dans les espaces communs ; et le renforcement des partenariats internationaux.
Cette augmentation sensible du budget – un tiers de plus que la précédente LPM (295 milliards d’euros) – a, dans un premier temps, bien plu aux grands chefs des forces armées et à la base industrielle et technologique de défense (BITD). Mais ils ont été rapidement calmés par les déclarations du ministre de la Défense Sébastien Lecornu, qui a annoncé qu’il ne fallait pas tout sacrifier à l’urgence de la guerre en Ukraine, le but premier de cette future LPM étant une programmation globale.
En lisant bien, on s’aperçoit que les priorités restent la dissuasion nucléaire, le cyber, et donc la guerre informationnelle, et l’espace.
Avec certainement en filigrane, non pas une guerre de haute intensité face à un ennemi venant de l’Est, mais une présence plus affirmée très loin de la France, dans le Pacifique. Donc, foin de centaines de chars Leclerc, de Griffon, de Jaguar et de Caesar ! Ce sont plutôt de nouvelles frégates qui seraient prévues, et un renforcement des positions dans le plus vaste océan du globe terrestre. Car finalement, selon le gouvernement, l’arme nucléaire serait suffisamment dissuasive pour la défense du sol national.
Pour certains, se préparer à une guerre de haute intensité est un non-sens, car la France n’en a pas les moyens. Actuellement, les forces armées françaises sont taillées pour être une puissance régionale en Afrique et en Méditerranée. Et dans le cadre d’un effort naval dans le Pacifique, on imagine le nombre de navires qu’il faudrait construire pour assurer une permanence de poids…
Aussi des questions s’imposent. Qu’est-ce qui justifie une présence importante de l’armée française dans le Pacifique, outre le fait que la France y dispose de 63 % de ses zones économiques exclusives (ZEE) – une exception en Europe. Et avec quel allié ? Car après la constitution en septembre 2021 de l’AUKUS, l’alliance militaire tripartite formée par l’Australie, les États-Unis et le Royaume-Uni, et qui vise à contrer l’expansionnisme chinois dans l’Indo-Pacifique, la marge de manoeuvre est très faible. Et enfin, contre qui ?
Bonne lecture
Eric Micheletti
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