L’Amiral Charles Anthony « Chas » Richard, le chef du commandement stratégique américain (les forces nucléaires) a été très clair. Les États-Unis doivent anticiper et se préparer à un conflit majeur avec la Chine dans un futur proche.

La guerre en Ukraine déclenchée par la Russie n’est qu’un « échauffement » précédant ce conflit majeur. Le détonateur sera sans doute une attaque contre Taïwan.

Cette déclaration a été faite le 3 novembre lors d’un symposium donné par la « ligue des sous mariniers » américains.
Pour lui, la guerre actuelle en Ukraine est le « prélude » à un « très long » conflit entre la Chine et les États-Unis alors que le pouvoir de dissuasion classique et nucléaire de ces derniers s’érode lentement. Il est urgent de repenser les capacités de dissuasion des États-Unis dans la perspective de se préparer à un conflit avec la Chine. Pour lui, cela constitue un tout autre « calibre » que la guerre ayant lieu actuellement en Ukraine.
De manière très imagée, il a décrit la capacité de dissuasion des USA vis-à-vis de la Chine « en train de lentement sombrer car cette dernière augmente plus rapidement ses capacités militaires […] Il n’est pas question de savoir si nos stratégies, nos commandants et nos chevaux sont bons, mais simplement de constater que nous n’avons pas assez de montures et c’est là le vrai problème ».

Cela fait des années que les responsables militaires américains alertent sur le développement de la Chine en matière d’armements et de technologies qui l’amènent à la parité dans certains domaines.
Le problème sur zone se complique avec les menaces nucléaires nord-coréennes et russes.
Pour l’amiral Richard, les armes hypersoniques orbitales et les torpilles nucléaires (propulsion et charges) développées par la Chine et la Russie sont des défis à relever.

En dehors du discours habituel de tout responsable militaire de haut niveau qui veut justifier des augmentations des budgets qui lui sont alloués, il est intéressant de constater que pour le Pentagone, un conflit avec la Chine est inéluctable à un horizon relativement court. Il est vrai que les États-Unis se sentent encore plus concernés qu’avec la Russie parce que la Chine est située sur leur rive opposée du Pacifique, donc une menace directe sur le territoire US.

Si les inquiétudes américaines semblent justifiées car la Chine a évidement une volonté hégémonique sur la région Pacifique en commençant par Taïwan, et s’il semble normal que le Japon, la Corée du Sud et l’Australie qui sont en première ligne soient concernés, la question se pose pour l’Europe.

Elle a déjà été entraînée dans le conflit ukrainien avec toutes les conséquences que cela comporte pour ses ressortissants, va t’elle également « suivre » Washington dans le « grand jeu » lancé contre la Chine ? La visite en Chine du chancelier allemand Olaf Scholz le 4 novembre lors de laquelle il a été reçu par son homologue, le président Xi Jinping, semble montrer des réticences existent entre ‘atlantistes’ et adeptes d’une certaine indépendance vis-à-vis de Washington.

Sur un plan strictement militaire et en dehors de tout symbolisme politique, que pèsent quelques navires de guerre européens déployés sur zone – très loin de leurs bases de départ – face à l’armada chinoise ? Pour le moment, il est hors de question, à la fois sur le plan financier et technique, d’augmenter de manière significative le nombre de navires de guerre construits en Europe en dehors des programmes existants qui s’étalent sur plusieurs années.

Question subsidiaire : les dirigeants européens sont-ils prêts à faire tuer leurs concitoyens – même militaires d’active – pour défendre Taïwan ? Cela avait été le cas lors de la guerre de Corée mais il n’est pas certain que les opinions publiques plus informées par les réseaux sociaux n’apportent leur consentement.

Pour terminer, beaucoup d’observateurs semblent oublier que la « Guerre froide » n’a pas été un « long fleuve tranquille ». Elle a fait de nombreuses victimes (c/f carte ci-dessous). Mais la période à venir pourrait être beaucoup plus dévastatrice

Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres a déclaré lors de la COP27 à Charm El-Cheikh, en Égypte : « L’humanité a le choix : coopérer ou périr. Il s’agit soit d’un pacte de solidarité climatique, soit d’un pacte de suicide collectif ».

Il n’a pas tort mais le « suicide collectif » risque bien de ne rien avoir à faire avec le réchauffement climatique…

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Texte

Alain Rodier

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