La ville de Hadera (entre Tel-Aviv et Haïfa) a été le lieu d’une attaque terroriste le 27 mars. Deux Palestiniens de nationalité israélienne ont ouvert le feu au pistolet mitrailleur près d’un arrêt de bus tuant deux policiers âgés de 19 ans, Yezen Falah de confession druze et Shirel Aboukrat, une franco-israélienne, et en blessant quatorze autres personnes.

Les deux terroristes ont ensuite été neutralisés par des membres de l’unité anti-terroriste de la Police des frontières qui étaient hors service et dînaient dans un restaurant voisin. Le ministre de la défense Benny Gantz les a félicité tout en présentant ses condoléances aux familles des victimes et souhaitant un rétablissement rapide aux personnes blessées.

Selon les premières informations, les terroristes seraient deux cousins identifiés comme Ibrahim et Ayman Ighbariya. Ibrahim aurait été arrêté en 2016 en Turquie alors qu’il tentait de rejoindre l’État Islamique en Syrie. Il avait été extradé vers Israël où il avait purgé une peine de seize mois d’emprisonnement (il est sorti de prison en 2020).

Dans une vidéo tournée avant l’attaque, les deux hommes font allégeance à l’État Islamique et au nouveau « calife », Abou Hassan al-Hachimi al-Qourachi intronisé le 10 mars 2022 suite à la mort d’Ibrahim al-Hachimi al-Qourachi(1).

Cette attaque a été revendiquée par la branche salafiste des brigades al-Nasser Salah al-Din qui regroupe des formations palestiniennes. Le communiqué précise qu’il s’agissait d’« une réponse au sommet de l’axe du mal », en référence au sommet du Néguev qui s’est ouvert le 27 mars. Les ministres des Affaires étrangères égyptien, émirati, marocain et du Bahreïn y participent ainsi que le secrétaire d’État américain Anthony Blinken. La conférence traite de la sécurité au Moyen-Orient dans le cadre des accords d’Abraham. Le Premier ministre israélien Naftali Bennett s’est absenté pour se rendre sur les lieux de l’attaque.

Le chef du principal parti politique arabe en Israël (Ra’am) Mansour Abbas a condamné cette action terroriste dans les termes suivants ; « ce crime répugnant a été inspiré par l’État Islamique qui ne reflète pas la population arabo-israélienne qui souhaite vivre dans le respect et en accord avec la loi ».

Dès lundi, cinq suspects ont été arrêtés dont trois dans la ville arabe d’Umm el-Fahm, le lieu de résidence des deux terroristes située à une vingtaine de kilomètres de Hadera.

Déjà le 22 mars, l’ancien professeur Mohammed Abu al-Kiyan avait mené une attaque au couteau à Beer Sheba, la principale ville du désert du Néguev. Quatre personnes avaient été tuées et deux autres blessées. L’assaillant qui avait purgé une peine de prison de 2016 à 2019 pour apologie de Daech avait été abattu. L’EI avait qualifié ce terroriste d’« inghamasi », c’est-à-dire un activiste d’élite qui combat sans esprit de retour.

Ces deux actions mortelles revendiquées par Daech sont rares en Israël. En 2017, une cellule palestinienne se revendiquant de Daech avait conduit une attaque dans la vieille ville de Jérusalem. Une femme garde-frontière avait été tuée et plusieurs personnes blessées avant que les assaillants ne soient neutralisés.

Ces deux assauts constituent aussi un échec pour les services de sécurité israéliens chargés de surveiller les factions extrémistes palestiniennes. D’ailleurs, le Hamas et les Jihad Islamique palestinien (JIP) se sont félicités de ces opérations bien qu’ils ne soient pas affiliés à Daech.

Globalement, les mouvements palestiniens sont avant tout nationalistes et leur héritage marxiste-léniniste les empêche de verser dans l’intégrisme religieux. Cela dit, des groupuscules et des individus affiliés à la cause de Daech sont présents depuis des années en Israël et dans la bande de Gaza. D’ailleurs, une des plus importante province de l’État Islamique est celle du Sinaï qui jouxte la bande de Gaza.

Depuis l’effondrement du cœur du mouvement en Syrie et en Irak en 2017-2018, les provinces extérieures ont repris le flambeau renouvelant de violence. En Israël, les autorités parlent systématiquement de « loups solitaires ». Or, on s’est bien rendu compte en Europe que ce genre d’individu n’était jamais « solitaire ». Dès à présent, l’État hébreu risque fort de devenir une cible prioritaire pour les « inghamasis ».

1. Voir « L’Ukraine cache des conflits qui auront des conséquences graves » du 28 mars 2022.

 

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Texte

Alain Rodier

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