Les tragiques événements du 23 mars 2018 à Trèbes ont démontré une nouvelle fois l’intérêt de disposer d’unités de proximité capables d’intervenir rapidement lors d’attaque terroriste. Le nombre de victimes aurait pu être plus important si le peloton de surveillance et d’intervention de la gendarmerie (PSIG) et l’antenne GIGN de Toulouse n’étaient pas intervenus sur place dans un temps réduit, afin de contenir et d’isoler le terroriste. Dans la matinée du 23 mars 2018, à 10 h 13 sur le parking des Aigles de la Cité, à Carcassonne, Radouane Lakdim vole une voiture, tuant le passager et blessant très grièvement le conducteur qu’il pousse hors du véhicule. Quelques minutes plus tard, il se gare à proximité de la caserne Laperrine du 3e régiment de parachutistes d’infanterie de marine. Son but est de tirer sur des militaires. N’en voyant pas, il roule un peu plus loin et repère un groupe de quatre CRS de la compagnie 53 qui terminent leur footing et rentrent à la caserne. Il tire à six reprises et blesse grièvement l’un d’entre eux au poumon et à l’épaule.

L’alerte générale est donnée

 

Connaissant bien la région, il se dirige ensuite en direction de la commune de Trèbes. Et à 10 h 40, à 8 km du premier lieu, le terroriste entre dans un Super U aux abords de la ville, en criant « Allahu Akbar ». Il est armé d’un pistolet en calibre 7,65 mm, d’un couteau de chasse et de trois engins explosifs artisanaux. Aussitôt, le terroriste tire à bout portant sur le boucher, puis abat un client à proximité d’une caisse. Une vingtaine de personnes parviennent à s’échapper, d’autres à se cacher dans la chambre froide du supermarché. L’alerte générale est déclenchée à cet instant et tous les services d’Etat présents dans la région sont mobilisés pour converger vers le Super U. Les premiers intervenants du peloton de surveillance et d’intervention et des gendarmes de Trèbes arrivent sur place à 11 heures. Ces derniers investissent la salle vidéo du supermarché, afin d’avoir une vue globale de la situation. Sur les images, ils découvrent que des corps et des blessés jonchent le sol. Ordre est alors donné aux primo-intervenants de progresser en colonne en direction de l’assaillant. Leur mission est de stopper la tuerie et d’évacuer un maximum de clients et de salariés, comme la procédure l’impose. Le djihadiste est alors isolé dans la salle des coffres, mais il détient une caissière en otage. Le lieutenant-colonel Arnaud Beltrame, qui est sur place avec d’autres gendarmes, décide d’entamer des négociations avec Radouane Lakdim, puis de se substituer à l’otage. Il dépose son arme de service et ordonne à ses hommes de se retirer à la demande du terroriste. Le téléphone portable de l’officier supérieur est toujours allumé, ce qui permet aux forces de l’ordre situées à l’extérieur du bâtiment de suivre en partie les événements à distance. L’officier supérieur entre dans la salle des coffres à 11 h 28 pour prendre la place de la caissière. A 12 h 10, l’antenne GIGN de Toulouse arrive sur place, reprend la main sur les opérations et engage immédiatement une phase de négociation à distance par le biais des négociateurs du GIGN.

« Assaut ! Assaut ! »

 

A 13 h 10, le terroriste sort de la salle des coffres et utilise le lieutenant-colonel Beltrame comme bouclier humain sous la menace d’une arme posée sur sa tempe. A 14 h 16, le gendarme semble apparemment entrevoir une possibilité de désarmer le terroriste et tente une action en criant « Assaut ! Assaut ! » afin d’alerter les gendarmes de l’antenne GIGN prépositionnés dans le supermarché. Instantanément, trois coups de feu sont tirés par le terroriste. Ces tirs touchent l’officier à l’avant-bras, à la main et au pied sans le tuer (l’autopsie démontrera quelques jours plus tard que ces tirs n’étaient pas létaux). Mais Radouane Lakdim réussit à lui porter un coup fatal avec son couteau. Selon les autorités, la mort est due à « une plaie gravissime de la trachée et du larynx par arme blanche ». Tout se passe extrêmement vite et l’unité toulousaine est encore en mouvement pour s’approcher de l’assaillant lorsque l’officier supérieur est mortellement blessé par le djihadiste. Le terroriste est neutralisé quelques secondes plus tard par la colonne d’assaut, alors qu’il ouvre le feu en direction des gendarmes. Durant cette phase d’action, un sous-officier de l’antenne GIGN de Toulouse est touché à la jambe par un projectile. L’action prend fin à cet instant. Les blessés sont évacués du Super U de toute urgence par les deux hélicoptères de secours présents sur place.

Procédure d’urgence absolue

 

Malgré l’issue tragique de ces événements, la procédure d’urgence absolue mise en place après les attentats de 2015 a vraisemblablement permis de sauver des vies dans le supermarché de Trèbes. Les premiers intervenants sont arrivés très vite sur place et ont pu mettre en sécurité un grand nombre de personnes. Les gendarmes d’alerte de l’antenne toulousaine du GIGN, quant à eux, ont pu prendre en compte la situation dès leur arrivée, se prépositionner et préparer un plan d’assaut immédiat en attendant les gendarmes du GIGN. Alertés par le lieutenant-colonel Beltrame et par les coups de feu, ils sont intervenus immédiatement, comme la procédure l’impose en cas d’urgence absolue. Le GIGN, de son côté, avait mobilisé des forces dès le début de l’alerte attentat. L’unité est en effet préparée pour ce type d’événement et un groupe de la force d’intervention (FI) est constamment prêt à intervenir en quelques minutes. Plusieurs Puma du groupement interarmées d’hélicoptères (GIH) basés à Villacoublay et un EC145 de la gendarmerie ont été immédiatement mobilisés pour projeter un détachement d’une vingtaine de gendarmes GIGN dans l’Aude.

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