RAIDS s’est rendu au salon Defense Services Asia (DSA) qui s’est déroulé en avril dernier à Kuala Lumpur, où d’innombrables chantiers agrandissent et surélèvent chaque jour la capitale de la Malaisie. Reflet du dynamisme de l’industrie malaisienne, cette 16e édition était également marquée par une présence massive des industriels chinois et turcs.

La France est l’un des principaux fournisseurs d’équipements de défense de la Malaisie. Ainsi, Naval Group a fourni clé en main une sous-marinade (deux sous-marins Scorpène et formation complète dispensée par DCI) et six frégates Gowind. Thales, Renk France et Safran sont à bord du char polonais PT-91M. Thales fournit toute la vétronique des VCI 8 x 8 Deftech Gempita fabriqués sous licence turque FNSS. Nexter ne désespère pas vendre un jour le Caesar, mais le constructeur français présenta le canon 105LG1, plus léger et moins cher que son aîné, et surtout objet d’un contrat signé pendant le salon. L’artillerie malaisienne va en effet se doter d’un premier bataillon de 18 pièces entièrement numérisées (calculateur balistique Nexter Bacara et centrale de navigation inertielle Advans Lyra d’IxBlue) et d’un lot de munitions ERG3 à longue portée. Nexter coopère avec Advanced Defence Systems (ADS) implanté à Gemas. Les livraisons courront jusqu’en 2020. D’autres commandes pourraient suivre dans quelques années. La Malaisie devient le troisième client du 105LG1 de la région après la Thaïlande et l’Indonésie. Airbus a placé quatre A400M et douze hélicoptères EC725 Cougar. Enfin, Deschamps fournit des solutions de stabilisation des sols pour le génie et l’aviation. L’importance du marché malaisien est telle que la DGA y maintient en permanence un attaché d’armement en poste à l’ambassade. 

L’industrie française, forte de son positionnement, ne relâche pas son attention car les forces locales sont loin d’avoir satisfait leurs besoins. C’est ainsi que Naval Group s’intéresse au programme de trois Multi Role Support Ships (MRSS), sorte de petit BPC multimission destiné autant aux opérations amphibies qu’aux missions de soutien aux populations en cas de catastrophe naturelle. Rappelons que la Malaisie a une géographie très particulière avec une moitié péninsulaire et une autre dans la partie nord de l’île de Bornéo, auxquelles s’ajoutent d’innombrables petites îles. Un MRSS y a donc toute sa place. 

La flotte sous-marine n’est pas complète et la marine a l’ambition d’ajouter un jour deux unités Scorpène supplémentaires. Dassault est présent depuis des années pour équiper l’armée de l’air locale de Rafale, son principal adversaire étant l’Eurofighter Typhoon promu par BAE. Renk France a exposé son nouveau groupe motopropulseur pour chars de type « T » destiné à la modernisation des chars PT-91M. 

Comme de nombreux pays émergents, la Malaisie exige désormais des compensations industrielles à ses achats d’armes étrangères. Trois groupes locaux concentrent l’essentiel des offsets concédés par les industriels étrangers. DRB-Hicom DefTech travaille avec les turcs FNSS et Aselsan. Ce dernier a transféré dans le catalogue de DRB-Hicom une partie de sa gamme de drones et de tourelleaux téléopérés terrestres et navals. Les chantiers navals Boustead coopèrent avec Naval Group. Quant à Weststar, il a noué de nombreux partenariats avec diverses sociétés étrangères dont IAG. 

Le salon DSA s’est déplacé cette année pour la première fois dans le tout nouveau centre des exhibitions de Kuala Lumpur. On a pu noter une présence massive des industriels chinois et un très impressionnant pavillon turc. Les industriels français étaient majoritairement rassemblés au pavillon France organisé par le Groupement des industries de construction et activités navales (GICAN). 

Le programme Gempita

C’est le plus important programme de l’armée de terre malaisienne et il concerne l’infanterie et la cavalerie. L’AV8 Gempita est basé sur le châssis du FNSS Pars 8 x 8 sur lequel sont intégrés des armements et des équipements destinés à former une famille de véhicules de combat. 

Dans le cadre d’un transfert de technologies, c’est DefTech qui le fabrique sous licence. A ce jour, 118 engins sur 257 ont été livrés en neuf variantes. Trois autres versions devraient être considérées sous peu : reconnaissance NRBC, dépanneur et mortier de 120 mm. Pour la première fois, la version de surveillance était exposée au salon. Elle intègre un mât Rheinmetall portant une caméra Catherine et un radar Squire de Thales. 24 exemplaires doivent être livrés.

C’est le groupe sud-africain Denel qui fournit les armements, en l’occurrence un tourelleau de 12,7 mm pour les VTT (54 véhicules) et une tourelle de 30 mm équipée de deux rampes doubles de missiles antichars ZT-35 Ingwe d’une portée de 5 km. Cette dernière équipera aussi 54 engins.

Le Gempita est un véhicule de grandes dimensions, et on s’en aperçoit en se tenant à côté. Certaines versions sont amphibies et le volume de caisse a été dessiné pour cette fonction. Il est propulsé par un moteur diesel Deutz TCD 2015 V6 550hp couplé à une boîte ZF HP 902 automatique, qui lui procure une vitesse maximale sur route de 100 km/h. Thales fournit toute l’électronique et les moyens de communication.

Dans le cadre des accords entre FNSS et DefTech, ce dernier a la possibilité de proposer le Gempita à l’export. C’est ainsi qu’un engin armé d’une tourelle de 25 mm et exposé au salon se prépare à des essais en Arabie Saoudite cet été.

Le groupe motopropulseur ESM350S de Renk France

Le char PT-91M fut un précurseur dans la mondialisation des systèmes d’armes : il a été conçu en Pologne avec une conduite de tir de Safran, une motorisation de tourelle d’EADS, une boîte de vitesses Renk France, une mitrailleuse de 12,7 mm belge, un canon de 125 mm usiné en Slovaquie chez ZTS Martin et des munitions bosniaques ! Il est l’une des versions les plus sophistiquées du char T-72. Après dix ans de service, l’armée malaisienne envisage de le moderniser pour le mettre technologiquement à hauteur et pallier certaines déficiences. 

En particulier, le moteur Wola d’origine polonaise n’est plus produit et son soutien pose problème. Renk France propose donc un nouveau groupe motopropulseur (GMP) très compact et totalement intégré qui se met en lieu et place de celui d’origine. Ses formes géométriques lui permettent de se monter également sans modification dans les caisses de chars T-72, M-84, T-90, voire T-80/84. Ce GMP est composé d’une boîte automatique ESM350S à huit rapports avant et quatre arrière, d’un moteur Scania Di16 V8 de 16 litres développant de 1 000 à 1 200 chevaux suivant le réglage et l’injection common rail, et d’un système de refroidissement conçu par Renk. Le choix d’un moteur Scania de grande série garantit aux clients potentiels un suivi technique et la fourniture de rechanges bien au-delà de la vie opérationnelle des chars. Scania dispose d’un réseau très dense de revendeurs et de dépôts logistiques en Malaisie et dans tout le Sud-Est asiatique. Une génératrice de 20 kW est intégrée de base. L’entreprise française garantit la conception de son GMP sans composant ITAR ni technologie allemande qui pourraient compromettre l’obtention des licences d’exportation. Un critère important pour bon nombre de clients potentiels. Avec son GMP, Renk France fournit aussi un jeu de commandes pour le poste de pilotage avec un volant comprenant un écran de visualisation, ainsi qu’un sélecteur de contrôle de la boîte. Les commandes et le diagnostic du GMP sont réalisés par un bus CAN.  

Les différences de performances de mobilité entre un T-72 classique et un T-72 équipé du GMP 350S en termes de freinage, accélération, marche arrière, progression tout-terrain et manœuvrabilité sont impressionnantes. Le pivot sur place devient en outre possible. Comme le montrent les opérations en cours au Yémen, en Syrie, en Irak ou en Ukraine, la rusticité des matériels est un critère d’emploi important dans les opérations de longue durée. A côté des chars M1 que les insurgés pétardent, il y a les T-55 et les T-72 qu’ils conservent précieusement. Les armées utilisatrices des chars « T » ont donc la possibilité de préserver leur flotte à condition qu’une modernisation de la fonction mobilité porte les chars au meilleur niveau opérationnel. Renk France vise donc non seulement le marché des chars « T » en service, mais aussi les fabrications neuves de chars « T » ou leurs dérivés, le GMP étant capable d’équiper tout char entre 40 et 55 tonnes.

Les véhicules FS de Cendana

La société malaisienne Cendana, basée à Putrajaya, a présenté sa gamme de véhicules légers pour forces spéciales. Basées sur le même châssis 4 x 4, les deux versions, attaque et transport/appui, sont propulsées par un moteur diesel cinq cylindres de 2,8 litres, de 197 chevaux, qui leur permet d’atteindre 170 km/h. 

La version attaque était classiquement armée d’une mitrailleuse de 12,7 mm en circulaire centrale et d’un pivot sur le capot avant pour mitrailleuse de 7,62 mm.

Le camion Handalan II

Le Handalan II est le cheval de bât de l’armée malaisienne, qui l’utilise principalement en version cargo bâchée. 

Le moteur et les ponts sont de conception Hicom.

Caractéristiques 

Moteur : Hicom 6HHI de 195 ch

Transmission : Allison 2500SP automatique

Vitesse sur route : 95 km/h

Masse remorquée : 3 t

Pente : 70 %

Dévers : 30 %

Gué : 0,8 m

Pneumatiques : 1100R20

Rayon de braquage : 8,5 m

Réservoirs de carburant : 140 litres

Le Nimr RIV

Le Rapid Intervention Vehicle (RIV) de la société émirienne Nimr est destiné aux unités des forces spéciales de l’armée et des gardes-frontières. Il peut être acheminé par voie aérienne (parachutage) ou poser d’assaut, sous élingue ou dans la soute d’un CH-47. Il reprend la chaîne cinématique de la famille Nimr. La configuration de base n’est pas protégée, mais le constructeur propose des plaques latérales de blindage ainsi qu’un renforcement du plancher face aux mines. 

Comme tous ses congénères destinés aux FS, le RIV peut embarquer une combinaison d’armements faite de mitrailleuses, lance-grenades, lance-roquettes et lots d’explosifs. Il peut recevoir de nombreux moyens C4ISR. Quatre pax prennent place à bord, mais il est possible de configurer le véhicule pour six pax, au détriment de l’emport, bien entendu.

Caractéristiques

Longueur : 4,9 m

Largeur : 2 m

Hauteur : 1,81 m

Charge utile : 1,5 t

Masse en ordre de combat : 4 t

Vitesse sur route : 160 km/h

Puissance moteur : 300 ch

Pente : 60 %

Dévers : 40 %

Marche à bord franc : 30 cm

Gué : 0,5 m

Rayon de braquage : 7,5 m

Autonomie : 1 000 km (à 120 km/h)

Le Tigon d’AVP‑Hanwha

La société malaisienne AVP et la firme coréenne Hanwha se sont associées pour promouvoir, en Malaisie et dans la région, le Tigon, qui est une version adaptée du Black Fox. La version présentée au salon était un VTT armé d’un tourelleau de 12,7 mm, mais les deux constructeurs précisent que l’engin peut recevoir des tourelles de moyen calibre et même une tourelle de 90 mm. Le VTT peut transporter jusqu’à 11 soldats. Le châssis est propulsé par un GMP américain constitué d’un moteur Caterpillar C9.3 six cylindres de 525 chevaux, associé à une boîte automatique Allison 4500SP à six rapports avant. La liaison sol intègre des roues indépendantes montées sur des doubles triangles (340 mm de course). Le Tigon affiche une masse en ordre de combat de 21 tonnes. Il est amphibie.

Caractéristiques 

Vitesse sur route : 100 km/h

Vitesse dans l’eau : 8 km/h

Pente : 60 %

Dévers : 30 %

Marche à bord franc : 50 cm

Tranchée : 1,5 m

Autonomie : 1 000 km

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Photos

Marc CHASSILLAN