L’Organisation non gouvernementale basée aux États-Unis « Human Rights Watch » (HRW) a demandé le 31 janvier 2023 à l’Ukraine d’enquêter sur une accusation d’emploi de mines antipersonnel dans la région d’Izioum. Les défenseurs des droits humains ukrainiens ont déploré cette déclaration publique qui ne peut que « soutenir l’ennemi » qui lui-même est sous le coup de nombreuses enquêtes pour crimes de guerre et contre l’Humanité.

HRW a publié un rapport à la même date faisant état de l’emploi de « mines papillon » PFM-1 près d’Izioum dans l’Oblast de Kharkiv au moment où les troupes russes occupaient la région.

Des restes de containers KPFM-1S-SK fabriqués en 1988 ont été découverts par l’ONG en octobre 2022 dans cette zone. Ces containers sont destinés à répandre 312 mines antipersonnel PFM-1 « Papillon » contenues dans la roquette de 220 mm 9M27K3 lmise en œuvre par un LRM BM-27 « Ouragan ». Le lanceur est armé de 16 roquettes ce qui lui donne la possibilité de répandre plus de 5.000 mines à des distances allant de 10 à 35 kilomètres.

HRW a documenté l’utilisation de mines dans neuf zones différentes dans et autour de la ville d’Izioum.
Les travailleurs humanitaires ont soigné près de cinquante personnes dont au moins cinq enfants blessés par ces mines. La moitié des blessés ont dus être amputés d’un pied ou d’un membre inférieur.
L’ONG a affirmé que les roquettes avaient été tirées vers des positions militaires russes depuis des zones alors contrôlées par l’armée ukrainienne.

Cet emploi, s’il est vérifié, est en contradiction avec la Convention de 1997 sur l’interdiction de l’emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, désignée « Convention d’Ottawa ». Cette Convention a été conclue le 18 septembre 1997 à Oslo, lors de la Conférence diplomatique sur une l’interdiction internationale totale des mines terrestres antipersonnel.
Conformément à son article 15, la Convention a été ouverte à la signature de tous les États à Ottawa les 3 et 4 décembre 1997 puis au Siège de l’Organisation des Nations Unies à New York. Elle a été ratifiée par l’Ukraine le 27 décembre 2005.

L’ONG a déclaré que l’utilisation de mines antipersonnel viole également les lois humanitaires internationales car elles ne font pas la différence entre les civils et les combattants.

En même temps, l’organisation des droits humains a critiqué l’armée russe pour avoir également déployé de telles mines : « les forces armées russes ont utilisé à plusieurs reprises des mines antipersonnel et commis des atrocités dans tout le pays, mais cela ne justifie pas l’utilisation par l’Ukraine de ces armes interdites» (NdA: théoriquement, le stockage de ces munitions était interdit à Kiev bien avant le déclenchement de l’agression russe en 2014).
Les mines ont entraîné le déplacement de civils et entravé les activités agricoles mais aussi l’acheminement d’aide humanitaire.
Le premier ministre ukrainien, Denys Chmyhal, a affirmé que la guerre d’invasion menée par la Russie avait fait de l’Ukraine le plus grand champ de mines du monde. Selon lui, 250 000 kilomètres carrés du pays seraient pollués par les mines.

Ces mines sont connues depuis l’invasion de l’Afghanistan par l’armée soviétique en 1979. Elles ont alors été largement répandues par des véhicules terrestres, des lance-roquettes, des hélicoptères et des avions (aujourd’hui, elles peuvent être répandues sur de grandes surfaces par des drones). Beaucoup d’enfants ont été blessés par ces engins en les manipulant car ils croyaient que c’était des jouets. Elles font encore des blessés aujourd’hui…

Il convient de remarquer que la « Convention d’Ottawa » n’a pas été signée par : les États-Unis, la Russie, la Chine, l’Inde, l’Iran, Israël…Ces pays se réservent donc le droit de les utiliser quand ils jugent que cela leur est utile.

Publié le

Texte

Alain Rodier

Photos

DR