Selon les déclarations du ministre de l’Intérieur turc, Ali Yerlikaya, une intensification des opérations policières contre le groupe État islamique (EIIL, Daech, ISIS, etc.) ont débuté suite à l’affrontement sanglant du lundi 29 décembre qui a eu lieu à Yalova en face d’Istanbul.

Cette affaire a coûté la vie à trois policiers et à six activistes de nationalité turque. Huit autres policiers et un membre des forces de sécurité ont été blessés.
Après un siège d’environ huit heures, des coups de feu ont éclaté lorsque la police a pris d’assaut une maison où se cachaient des activistes. Des forces spéciales de la province voisine de Bursa avaient été dépêchées en renfort.
Le ministre de l’Intérieur, Ali Yerlikaya, a déclaré que l’opération à Yalova avait été menée « avec la plus grande prudence » car des femmes et des enfants se trouvaient à l’intérieur de la maison. Les cinq femmes et les six enfants ont été évacués sains et saufs.

De son côté, l’EI a officiellement revendiqué l’action donnant le bilan des pertes des forces de sécurité turques : « 11 morts et blessés. »

Cette revendication est une reconnaissance de l’appartenance des hommes impliqués dans cette affaire à l’EI ce qui n’avait pas été le cas dans les attentats de Sydney(1) et Palmyre(2). Pour l’EI, les activistes alors impliqués s’étaient uniquement inspiré des consignes qu’il lance régulièrement sur les réseaux sociaux mais ils n’avaient pas de liens directs de subordination à l’organisation.

Les funérailles des trois officiers de police tués à Yalova – nommés İlker Pehlivan, Turgut Külünk et Yasin Koçyiğit (source : ministère de l’Intérieur turc) – ont eu lieu le lendemain.

Toujours selon Ali Yerlikaya qui s’est exprimé au Centre de coordination de la sécurité et des urgences du ministère de l’Intérieur, l’opération qui visait des terroristes de l’EI à Yalova entrait dans le cadre d’une campagne nationale plus vaste contre le mouvement salafiste-jihadiste. Des opérations simultanées avaient été menées le même jour sur 108 lieux différents dans 15 provinces.

Par ailleurs, le ministre turc de la Justice, Yilmaz Tunc, a annoncé que cinq suspects avaient été placés en garde à vue suite à cette affaire.

Il y a moins d’une semaine, les autorités avaient déjà appréhendé 115 suspects qui, selon la justice turque, planifiaient des attaques visant des non-musulmans pendant la période de Noël et du Nouvel An.

Le président turc Recep Tayyip Erdoğan a présenté ses condoléances aux familles des membres des forces de l’ordre tués lors de l’opération et a promis que la Turquie continuerait à lutter contre le terrorisme : « nous poursuivrons notre combat avec détermination, de manière multidimensionnelle et sans compromis contre les terroristes sanguinaires qui ciblent la paix de notre nation et la sécurité de notre État. » (source : la plateforme de médias sociaux turque NSosyal.)

Le 30 décembre, les forces de sécurité turques ont intensifié leurs opérations nationales contre l’organisation terroriste. 357 suspects ont été interpellés dans 21 provinces. Ces opérations ont été menées dans les principales villes, notamment à Ankara, Istanbul, dans les provinces d’Antalya (sud) et de Şanlıurfa (sud-est). Rien qu’à Istanbul, 110 suspects ont été arrêtés. Selon les autorités, les suspects interpellés dans cette ville avaient des liens avec les terroristes de Yalova.

Depuis sa création, l’EI a eu des relations compliquées avec Ankara. En juin 2014, il avait pris en otage 48 membres (et familles) du consulat turc de Mossoul avant de les libérer en septembre. À l’époque, l’EI ne faisait pas de quartier avec les otages préférant montrer sa sauvagerie via des vidéos d’assassinats particulièrement horribles. Ankara a donc été contraint de négocier pour obtenir la vie sauve de ses ressortissants sans que l’on ne sache exactement quelles ont été les contreparties.
Toujours est-il que la « trêve » a pris fin avec l’attentat de Suruç le 20 juillet 2015 qui a fait 23 morts. Ensuite, la liste est longue, le dernier assassinat ayant eu lieu le 28 janvier 2024 à l’église Santa Maria à Istanbul. Le total officiel des victimes est de 296 tués, dans leur immense majorité des civils.
À noter la fusillade du Nouvel An 2017 dans une boîte de nuit d’Istanbul qui a fait 39 victimes.

Ces dernières années, la Turquie a intensifié ses opérations de renseignement et de lutte contre le terrorisme visant les réseaux de l’EI opérant aussi bien à l’intérieur qu’à l’étranger.

C’est d’ailleurs une opération menée par l’Organisation nationale du renseignement turque (MİT) le long de la frontière afghano-pakistanaise à la mi décembre 2025 qui a permis l’arrestation du ressortissant turc Mehmet Goren alias « Yahya » accusé d’être un « administrateur » de l’EI. Il a ensuite été exfiltré vers la Turquie.

Les services de renseignement turcs ont une excellente vision de la nébuleuse jihadiste car ils la suivent depuis son origine dans les années 1990. Ils sont donc des partenaires incontournables pour leurs homologues occidentaux dans la lutte antiterroriste.

(1) Voir : « Massacre de Sydney, une opération terroriste préparée » du 17 décembre 2025.

(2) Voir : « Américains tués à Palmyre » du 16 décembre 2025.