Tulsi Gabbard, la Directrice du renseignement national (DNI) des États-Unis depuis 2025 a communiqué sur X le 20 décembre concernant ce qu’elle qualifie de « désinformation » de la part de l’Agence Reuters.

En effet, cette gigantesque Agence de presse britannique à l’origine(1) a publié le 19 décembre les informations suivantes : « les rapports du renseignement américain continuent d’avertir que le président russe Vladimir Poutine n’a pas abandonné ses objectifs de s’emparer de toute l’Ukraine et de récupérer certaines parties de l’Europe qui appartenaient à l’ancien empire soviétique, ont déclaré six sources proches du renseignement américain [NdA : noter l’ambiguïté : six sources « proches » du renseignement américain mais donc pas « internes »] Les rapports présentent un tableau radicalement différent de celui peint par les États-Unis. Le président Donald Trump et ses négociateurs de paix en Ukraine, qui ont déclaré que Poutine voulait mettre fin au conflit. Le plus récent des rapports date de fin septembre, selon l’une des sources […] Ils s’alignent largement sur les points de vue des dirigeants européens et des agences d’espionnage comme quoi il convoite l’ensemble de l’Ukraine et des territoires des anciens États du bloc soviétique, y compris les membres de l’alliance de l’OTAN, selon les sources [« les dirigeants européens et des agence d’espionnage » – terme très peu professionnel mais attractif pour le public – mais les deux ne sont pas mieux renseignés que les Américains…]. »

Toujours selon Reuters, le sénateur Mike Quigley membre démocrate de l’« United States House Permanent Select Committee on Intelligence » HPSCI (Commission permanente spéciale du renseignement de la Chambre des représentants des États-Unis) a déclaré : « les renseignements indiquent depuis toujours que Poutine en veut toujours plus […] Les Européens en sont convaincus. Les Polonais en sont absolument convaincus. Les pays baltes pensent être les premiers. »

L’ancienne élue démocrate puis républicaine aujourd’hui à la tête de la communauté du renseignement américain a rétorqué : « vous soutenez sciemment les bellicistes qui cherchent à saper les efforts inlassables du président Trump pour mettre fin à cette guerre sanglante qui a fait plus d’un million de victimes des deux côtés [NdA : là, c’est de la politique intérieure US]. Dangereusement, vous propagez ce récit mensonger pour bloquer les efforts de paix du président Trump et semer l’hystérie et la peur au sein de la population afin de l’amener à soutenir l’escalade du conflit, ce que l’OTAN et l’UE souhaitent réellement pour entraîner les États-Unis dans une guerre directe contre la Russie.
La vérité est que les services de renseignement américains ont informé les décideurs politiques, notamment le membre démocrate du HPSCI cité par Reuters [NdA : Mike Quigley qui semble avaoir été « distrait »] que, selon eux, la Russie cherche à éviter une guerre de plus grande ampleur avec l’OTAN.
Ils estiment également que, comme l’ont montré les dernières années, les performances de la Russie sur le champ de bataille indiquent qu’elle n’a actuellement pas la capacité de conquérir et d’occuper l’ensemble de l’Ukraine, et encore moins l’Europe.
Non, c’est un mensonge et de la propagande. »

Pour un media, il est toujours très intéressant de citer des sources au sein des services de renseignement. Non seulement c’est très « vendeur » car le seul mot d’« espionnage » est populaire – le syndrome « James Bond » -, mais cela donne une légitimité au texte de l’article. Bien sûr, comme ces « sources » n’ont pas souhaité être « identifiées » car elles ne sont pas autorisées à parler, leur discours ne peut être vérifié mais cela fait sérieux et bien informé.
Le but de la démarche est majoritairement à usage politique interne avec comme objectif de discréditer les gouvernants aux manettes. Chez les Américain, c’est un véritable « sport » qui se joue quelque soient les dirigeants en place.

Pour les simples observateurs un peu avertis(2), dans le cas ukrainien il semble évident que l’armée russe et les services de renseignement (SVR, FSB, GRU) ne font pas preuve de l’efficacité et de la puissance qui leur sont généralement attribuées. Sans les sous-estimer – ce qui serait une erreur -, force est de constater qu’ils ne constituent pas une menace très crédible pour l’Europe même si la Russie est capable de mener des coups de main – tout le monde pense à l’accès terrestre à l’enclave de Kaliningrad -.
La situation catastrophique présentée par la presse occidentale est exagérée mais elle a pour but de détourner l’attention des citoyens des véritables problèmes auxquels ils sont confrontés quotidiennement et qui ne semblent pas aller en s’arrangeant.

Il est aussi intéressant de voir que Mme Gabbard cite l’OTAN comme « va-t-en-guerre » alors que l’Alliance est toujours sous la coupe des États-Unis. Une prévision de sortie ?
Pour l’Europe, les menaces restent toutefois bien réelles même si elles sont surdimensionnées(3) et il est vrai que celui qui veut la paix prépare la guerre : « Si vis pacem, para bellum. »

(1) L’entreprise britannique à l’origine a été introduite en bourse de Londres en 1984 . Elle a été achetée par le groupe de presse canadien Thomson Financial en 2007 constituant un nouvel ensemble rebaptisé Thomson Reuters.

(2) Voir : « La politique de la peur » du 12 décembre 2025.

(3) Voir : « Menaces sur l’Europe ? » du 20 novembre 2025.