Selon Ivan Katchanovski, politologue à l’Université d'Ottawa, spécialiste des conflits et de la communication politique en Ukraine, aux États-Unis et au Canada, le plan de paix proposé par les Américains concernant l’Ukraine serait le suivant :

1. La souveraineté de l’Ukraine sera confirmée.

2. Un accord de non-agression complet et global sera conclu entre la Russie, l’Ukraine et l’Europe. Toutes les ambiguïtés des 30 dernières années seront considérées comme résolues.

3. Il est prévu que la Russie n’envahira pas les pays voisins et que l’OTAN ne s’étendra pas davantage.

4. Un dialogue sera mené entre la Russie et l’OTAN, sous l’égide des États-Unis, afin de résoudre tous les problèmes de sécurité et de créer les conditions d’une désescalade, garantissant ainsi la sécurité mondiale et augmentant les possibilités de coopération et de développement économique futur.

5. L’Ukraine bénéficiera de garanties de sécurité fiables.

6. La taille des forces armées ukrainiennes sera limitée à (6) 00 000 personnes.

7. L’Ukraine accepte d’inscrire dans sa constitution qu’elle ne rejoindra pas l’OTAN, et l’OTAN accepte d’inclure dans ses statuts une disposition selon laquelle elle n’acceptera pas l’Ukraine à l’avenir.

8. L’OTAN accepte de ne pas déployer de troupes en Ukraine.

9. Des avions de chasse européens seront stationnés en Pologne.

10. Garanties américaines : Les États-Unis recevront une compensation pour cette garantie. Si l’Ukraine envahit la Russie, elle perdra la garantie. Si la Russie envahit l’Ukraine, outre une riposte militaire coordonnée et décisive, toutes les sanctions internationales seront rétablies, la reconnaissance des nouveaux territoires et tous les autres avantages de cet accord seront révoqués. Si l’Ukraine lance sans raison un missile sur Moscou ou Saint-Pétersbourg, la garantie de sécurité sera considérée comme caduque.

11. L’Ukraine conserve son droit à l’adhésion à l’UE et bénéficiera d’un accès préférentiel à court terme au marché européen pendant que la question est à l’étude.

12. Un ensemble de mesures internationales ambitieuses pour la reconstruction de l’Ukraine, comprenant notamment :
a. Création d’un Fonds de développement ukrainien destiné à investir dans les secteurs à forte croissance, notamment la technologie, les centres de traitement de données et l’intelligence artificielle.
b. Les États-Unis coopéreront avec l’Ukraine à la reconstruction, au développement, à la modernisation et à l’exploitation conjointes de l’infrastructure gazière ukrainienne, y compris les gazoducs et les installations de stockage.
c. Efforts conjoints pour restaurer les territoires touchés par la guerre, y compris la reconstruction et la modernisation des villes et des zones résidentielles.
d. Développement des infrastructures.
e. Extraction des minéraux et des ressources naturelles.
f. La Banque mondiale élaborera un programme de financement spécial pour accélérer ces efforts.

13. La Russie sera réintégrée dans l’économie mondiale :
a. La levée des sanctions sera discutée et convenue progressivement et au cas par cas.
b. Les États-Unis concluront un accord de coopération économique à long terme visant le développement mutuel dans les domaines de l’énergie, des ressources naturelles, des infrastructures, de l’intelligence artificielle, des centres de traitement de données, des projets d’exploitation des terres rares dans l’Arctique et d’autres opportunités commerciales mutuellement avantageuses.
c. La Russie sera invitée à réintégrer le G8.

14. Les actifs gelés seront utilisés de la manière suivante : Cent milliards de dollars d’avoirs russes gelés seront investis dans les efforts de reconstruction et d’investissement menés par les États-Unis en Ukraine. Les États-Unis percevront 50 % des bénéfices de cette opération. L’Europe ajoutera 100 milliards de dollars afin d’accroître le total des investissements disponibles pour la reconstruction de l’Ukraine. Les avoirs européens gelés seront débloqués. Le reste des avoirs russes gelés sera investi dans un train d’investissement américano-russe distinct, qui mettra en œuvre des projets conjoints dans des domaines à définir. Ce fonds visera à renforcer les relations bilatérales et à accroître les intérêts communs afin de dissuader toute reprise du conflit.

15. Un groupe de travail américano-russe conjoint sur les questions de sécurité sera créé pour faciliter et garantir le respect de toutes les dispositions du présent accord.

16. La Russie inscrira législativement une politique de non-agression envers l’Europe et l’Ukraine.

17. Les États-Unis et la Russie conviennent de prolonger la validité des traités sur la non-prolifération des armes nucléaires et le contrôle des armements, y compris le traité START-1.

18. L’Ukraine accepte de rester un État non nucléaire conformément au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires.

19. La centrale nucléaire de Zaporijia sera redémarrée sous la supervision de l’AIEA, et l’électricité produite sera partagée à parts égales entre la Russie et l’Ukraine (50/50).

20. Les deux pays s’engagent à mettre en place, dans les écoles et la société, des programmes éducatifs qui promeuvent la compréhension et la tolérance des différentes cultures ainsi que l’élimination du racisme et des préjugés :
a. L’Ukraine adoptera les règles de l’UE en matière de tolérance religieuse et de protection des minorités linguistiques.
b. Les deux pays conviennent de lever toutes les mesures discriminatoires et de garantir les droits des médias et de l’éducation ukrainiens et russes.
c. Toute idéologie et activité nazie doit être rejetée et interdite.

21. Territoires :

a. La Crimée, Louhansk et Donetsk seront reconnues de facto comme russes, y compris par les États-Unis.
b. Kherson et Zaporijia seront gelées le long de la ligne de contact, ce qui signifiera une reconnaissance de facto le long de la ligne de contact.
c. La Russie renonce aux autres territoires annexés (faisant probablement référence aux parties occupées par la Russie des oblasts de Kharkiv, Soumy et Dnipropetrovsk – NdT) qu’elle contrôle en dehors des cinq régions.
d. Les forces ukrainiennes se retireront de la partie de l’oblast de Donetsk qu’elles contrôlent actuellement ; cette zone de retrait sera considérée comme une zone tampon démilitarisée neutre, internationalement reconnue comme territoire appartenant à la Fédération de Russie. Les forces russes n’entreront pas dans cette zone démilitarisée.

22. Une fois convenus les futurs arrangements territoriaux, la Fédération de Russie et l’Ukraine s’engagent à ne pas les modifier par la force. Aucune garantie de sécurité ne sera applicable en cas de violation de cet engagement.

23. La Russie n’entravera pas l’utilisation commerciale du fleuve Dniepr par l’Ukraine, et des accords seront conclus sur le libre transport des céréales à travers la mer Noire.

24. Un comité humanitaire sera créé pour régler les questions en suspens :
a. Tous les prisonniers et corps restants seront échangés selon le principe du « tous pour tous ».
b. Tous les détenus civils et les otages seront libérés, y compris les enfants.
c. Un programme de réunification familiale sera mis en œuvre.
d. Des mesures seront prises pour atténuer les souffrances des victimes du conflit.

25. L’Ukraine organisera des élections 100 jours après la signature de l’accord.

26. Toutes les parties impliquées dans le conflit bénéficieront d’une amnistie complète pour les actions commises pendant la guerre et s’engageront à ne pas déposer de réclamations ni à poursuivre de plaintes à l’avenir.

27. Cet accord sera juridiquement contraignant. Sa mise en œuvre sera contrôlée et garantie par un Conseil de paix présidé par le président Trump. Des sanctions prédéterminées seront appliquées en cas de violation.

28. Une fois que toutes les parties auront accepté et signé ce mémorandum, le cessez-le-feu entrera en vigueur immédiatement après le retrait des deux parties vers les positions convenues afin que la mise en œuvre de l’accord puisse commencer.

Estimation optimiste de Washington

La porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt a déclaré le 20 novembre : « le président (Trump) soutient ce plan. C’est un bon plan à la fois pour la Russie et pour l’Ukraine et nous pensons qu’il est acceptable pour les deux parties. »
Washington s’attend à ce que le président Zelensky signe l’accord de paix d’ici le 27 novembre, jour de Thanksgiving.
L’accord devrait ensuite être présenté à Moscou, et les États-Unis espèrent que le processus devrait s’achever début décembre.

Réponse de la représentation ukrainienne au Conseil de sécurité de l’ONU

La représentation ukrainienne auprès de l’ONU a fait la déclaration suivante :
« L’Ukraine est prête à négocier une fin juste à la guerre, mais ses principes fondamentaux sont non négociables :
1. Aucune reconnaissance des territoires temporairement occupés comme « russes » ;
2. Plein respect de la souveraineté et du droit à la légitime défense de l’Ukraine ;
3. Liberté de choisir ses alliances. »

La guerre continue sur le terrain, les forces russes poursuivant leur grignotage – affirmant avoir finalement pris la ville de Kupiansk – et les bombardements dans la profondeur.

La proposition américaine risque d’être (très) mal accueillie par une partie de la population ukrainienne. Il est même question de troubles qui pourraient survenir à Kiev si le président Zelinsky se montrait trop « coopératif » avec Washington. La possibilité d’un putsch militaire est évoquée par certains observateurs.
La majorité des dirigeants européens sont furieux de ne pas être associés à ce plan de paix dont ils contestent – théoriquement en accord avec le président Zelinsky – un certain nombre de propositions qu’ils jugent inacceptables.
Quant au président Poutine, il a encore des atouts maîtres dans sa manche. Il est difficile de prévoir l’avenir mais il semble que dans l’état, le président Trump qui veut se « débarrasser » du problème ukrainien paraît fort optimiste.