Après une longue période durant laquelle l'Ukraine avait affirmé que des militaires nord-coréens combattaient en Russie sans présenter de preuve formelle, le président Volodymyr Zelensky a dévoilé une vidéo de deux prisonniers blessés.

Les deux hommes ont été filmés sur des lits d’un centre de détention à Kiev, l’un avec les mains pansées et l’autre avec la mâchoire bandée. Un médecin du centre de détention a précisé que le premier homme avait également une jambe cassée.

Photo SBU

Le Service de sécurité de l’Ukraine (SBU), a déclaré que l’un des soldats capturés n’avait aucun document tandis que l’autre avait une carte d’identité militaire russe au nom d’un homme de « Tuva », une région russe limitrophe de la Mongolie.

Photo : SBU

Cette pièce d’identité lui aurait été délivrée en Russie à l’automne 2024. La chaîne russe de télécommunications Agenstvo Novosti a identifié le document comme appartenant à Antonin Aranchin, un vrai citoyen russe né en octobre 1998.

Il a été précisé que « les prisonniers ne parlent pas l’ukrainien, l’anglais ou le russe, la communication avec eux s’est donc faite via des traducteurs sud-coréens.

Le service national du renseignement (NIS) sud-coréen a confirmé cette capture survenue le 9 janvier dans la région russe de Koursk, et a confirmé participer à leur interrogatoire aux côtés des services ukrainiens.

L’un des prisonniers aurait révélé lors de son interrogatoire qu’il a reçu un entraînement militaire des forces russes après son arrivée en novembre. Selon le NIS, « il a d’abord cru qu’il était envoyé en formation puis il s’est rendu compte à son arrivée en Russie qu’il avait été déployé au combat ».

Toujours selon un détenu : « les forces nord-coréennes auraient subi des « pertes importantes au cours des combats ».

L’un des deux se serait caché sans nourriture et sans eau durant 4 à 5 jours avant d’être capturé.

Selon Zelensky : « les forces russes et d’autres militaires nord-coréens achèvent généralement leurs blessés pour effacer toute preuve de l’implication de la Corée du Nord dans la guerre ».

Mais selon le NIS, « les estimations indiquent que le nombre de victimes dans les rangs des forces nord-coréennes a dépassé 3.000 dont environ 300 morts et 2.700 blessés ». Il précise : « des notes retrouvées sur des soldats morts indiquent que les autorités nord-coréennes ont fait pression sur eux pour qu’ils se suicident » y compris en « se faisant exploser avant la capture ». Le NIS estime le contingent nord-coréen déployé en Russie de 11.000 à 12.000 combattants.

L’intervention présumée d’une armée étrangère a constitué une escalade majeure dans l’invasion de l’Ukraine lancée en février 2022 par Vladimir Poutine. Elle entre dans une phase critique avec le retour de Donald Trump à la Maison Blanche.

La Russie et la Corée du Nord ont resserré leurs liens militaires depuis l’invasion bien qu’aucune des deux parties n’ait confirmé que les forces de Pyongyang se battaient pour Moscou.

Photo/ X

Un traité historique de défense mutuelle entre Pyongyang et Moscou, signé en juin 2024 est entré en vigueur il y a peu. Il prévoit « une aide militaire immédiate » en cas d’agression armée par un pays tiers.

L’état-major des forces sud-coréennes aurait observé des préparatifs qui lui font penser que la Corée du Nord s’apprête à dépêcher de nouvelles unités en Russie, en renfort ou pour relever celles qui se battent déjà.

Parallèlement, il semble que Moscou recrute également des volontaires au sein de la communauté immigrée chinoise (200.000 à 400.000) ce qui ne serait pas du goût de Pékin.

Selon les Conventions de Genève régissant le traitement des prisonniers de guerre, les gouvernements sont censés protéger ces derniers en ne les transformant par en objets de «curiosité publique». Ce concept est parfois interprété comme une interdiction de les présenter dans aucun cadre public mais dans ce cas, il s’agit pour Kiev de « prouver » l’implication directe de Pyongyang dans le conflit.

Cela devrait aussi permettre un échange de prisonniers mais selon le président ukrainien, l’un des détenus souhaiterait rester en Ukraine, information démentie par le World Street Journal (WSJ)… Il est vrai que Pyongyang doit avoir des moyens de coercition grâce aux familles des militaires restées au pays.

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Texte

Alain Rodier