Le 1er septembre, au moins 127 personnes ont été assassinées lors d'une attaque menée par des terroristes de la « Province État Islamique pour l’Afrique de l’Ouest ( Islamic State West Africa Province - ISWP) » contre le village de Mafa dans l'État de Yobe au nord-est du Nigeria. Les attaquants ont pris soin de séparer les hommes des femmes et des enfants avant de les massacrer. Des blessés auraient aussi été signalés.

Les activistes ont envahi la ville à bord de plus de 50 motos. En plus des meurtres, ils ont incendié de nombreux magasins et maisons.

 

Selon Zagaz Ola Makama, un analyste en sécurité en Afrique de l’Ouest, « le massacre de Mafa serait une frappe de représailles de l’ISWAP, qui aurait été irrité par la saisie de ses approvisionnements par les troupes militaires et le meurtre de trois de ses principaux commandants par des villageois plus tôt dans la journée. Les commandants tués, identifiés comme Munzir Man, Shuib Imam et Khaeed Jorro, ont été tués alors qu’ils tentaient de collecter des impôts auprès des villageois ».

À noter que cette zone se trouve sur une route de contrebande qui rejoint les bases de l’ISWAP situées dans la région du lac Tchad.

Une revendication énumérant les griefs contre le village a été retrouvée sur les lieux Elle a été complétée par une lettre écrite en arabe publiée le 3 septembre.

Dans ces messages, l’ISWAP déclare :

« les villageois sont considérés combattants […] responsables de la morts de 9 moudjahidins ces derniers mois[…] ils ont demandé au gouverneur de Yobe d’installer une base militaire […] les autres villages les évitaient car leur collaboration était connue […] 130 hommes majeurs ont été séparés des femmes et des enfants et exécutés […] le village est accusé d’aider l’armée contre les jihadistes. »

« Ceci est un message des soldats du Califat de la province d’Afrique de l’Ouest aux dirigeants, aux mukhtars (responsables civils) et au reste des habitants et des agriculteurs de la ville de Mafa et des villages environnants. […] Vous avez été invités à rester sur vos terres en sécurité. Les soldats du Califat ne vous feront aucun mal, ne vous menaceront pas de votre argent, ne vous empêcheront pas d’exercer aucune de vos activités, qu’il s’agisse d’agriculture, de commerce, etc., mais vous vous êtes soulevés avec arrogance …  Vous avez fait du mal à nos frères ces derniers jours […] et vous avez coopéré et sympathisé avec les apostats pour tuer nos frères, et lorsque nous sommes arrivés dans la région, nous ne vous avons pas fait de mal […] Nous nous sommes limités à ceux dont les mains étaient tachées du sang de nos frères et qui, selon les informations que nous avions recueillies, avaient été attaqués par leurs armes. Nous pensions ainsi vous avoir avertis par le langage de la guerre, dans l’espoir de vous dissuader… »

Le 4 septembre, 87 personnes ont été enterrées à Babbangida et 40 autres à Mafa.

Rappel sur la Province État Islamique pour l’Afrique de l’Ouest

 

L’une des branches extérieures de Daech les plus puissantes est la Province État Islamique pour l’Afrique de l’Ouest ( Islamic State West Africa Province – ISWP) qui contrôle de larges pans de territoire au Nigeria et dans les pays voisins. Elle a été formé en 2015 lorsque le « califat » autoproclamé établi à cheval sur la Syrie et l’Irak par l’État Islamique en Irak et au Levant, EIIL (Islamic State of Iraq and Sham, ISIS) a publiquement accepté la demande d’allégeance du groupe terroriste nigérian Boko Haram.

L’ISWP rejette les frontières nationales et cherche à discréditer les gouvernements régionaux et, à terme, à les remplacer par un État de type ISIS.

Il lutte également contre Boko Haram qui est officiellement réapparu en 2016 lorsque certains de ses combattants se sont séparés de lSWP.

Ce groupe exploite les mauvaises conditions économiques et les divisions sociales pour attirer de nouveaux adeptes – particulièrement au sein de la jeunesse déshéritée. Ses combattants estimés entre 4.000 et 5.000 hommes se livrent à des violences sectaires contre les chrétiens, à des attaques contre les forces de sécurité et les autorités civiles et administratives. L’ISWAP tire ses revenus de l’« impôt révolutionnaire » et des rançons exigées pour libérer des otages, souvent de très jeunes filles enlevées dans des écoles.

Basé initialement dans le nord-est du Nigéria, le groupe s’est progressivement étendu en 2022 dans les États du centre et du sud-ouest du Nigéria, de Kogi, Taraba et Kaduna. Il conduit des opérations dans toute la région du bassin du lac Tchad au Cameroun, au Tchad, au Niger et au Nigéria.

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Texte

Alain Rodier