Un tribunal américain a condamné Dairo Antonio Úsuga également connu sous le nom d'Otoniel, un baron de la drogue colombien, à 45 ans de prison.
Otoniel âgé aujourd’hui de 51 ans, était un trafiquant de cocaïne notoire qui a été le chef du Clan du Golfe, le gang criminel le plus puissant de Colombie pendant plus de neuf ans.
Il a « plaidé coupable » en janvier pour avoir dirigé une entreprise criminelle et s’être livré au trafic de drogue ce qui lui a permis d’éviter une peine de prison à perpétuité incompressible.
Lors de sa condamnation le 8 août, il a déclaré être désolé pour sa conduite : « je présente mes excuses aux gouvernements des États-Unis et de Colombie et aux victimes des crimes que j’ai commis ». Il a également dit qu’il « acceptait la responsabilité des crimes qu’il avait commis ». S’il survit assez longtemps pour sortir de prison (il aura alors 96 ans sauf s’il obtient des réductions de peine pour bonne conduite), il devrait être renvoyé en Colombie où il serait de nouveau jugé sur place pour les crimes dont il a été le commanditaire… En effet, il y a ordonné le meurtre d’ennemis présumés, dont l’un a été torturé, enterré vivant et décapité, et a terrorisé le grand public. Il a même offert des primes pour l’assassinat de policiers et de soldats et même 70 000 $ pour un chien policier.
L’accusation l’a décrit comme « le plus important trafiquant de stupéfiants colombien depuis Pablo Escobar [le chef du cartel de Medellín] ». Elle a estimé qu’il avait participé à l’expédition de près de 100 tonnes de cocaïne aux États-Unis.
La Drug Enforcement Administration (DEA) des États-Unis l’a qualifié de « l’un des trafiquants de drogue les plus violents et les plus prolifiques au monde ».
Otoniel a été arrêté en 2021 (1) puis extradé aux États-Unis en 2022 pour y répondre aux accusations de trafic de drogue qui pesaient sur sa tête depuis 2009. Il a longtemps échappé à son arrestation malgré les chasses à l’homme et les récompenses américaines et colombiennes offrant cinq millions de dollars au total. Après son arrestation, des membres du Clan du Golfe ont tenté d’assassiner un témoin à charge et son avocat.
Ses avocats ont demandé une peine maximale de 25 ans faisant valoir que sa jeunesse passée dans la pauvreté rurale entourée de guérilla, l’avait conduit à une vie de criminel.
Mais Dora Irizarry, la juge de district américaine chargée de l’affaire, a rejeté ces arguments, affirmant que sa jeunesse à elle passée dans un complexe résidentiel du sud du Bronx soumis au trafic de drogue et à la violence ne l’avait pas conduite sur une voie similaire…
Otoniel a remis aux autorités 216 millions de dollars dans le cadre de son « plaider coupable ».
Il était le chef du Clan du Golfe également connu sous le nom de Forces d’autodéfense gaitanistes de Colombie (ou AGC)qui est l’une des organisations criminelles transnationales les plus puissante et la plus brutale du pays. Elle regrouperait environ 6.000 membres.
Le gang, qui opère dans de nombreuses provinces et possède de nombreuses relations internationales se livre au trafic de drogue et de migrants, à l’extraction illégale d’or et au racket.
Il contrôle de nombreuses routes utilisées pour faire passer de la drogue de la Colombie aux États-Unis mais aussi en Europe et jusqu’à la Russie.
Il est vraisemblable qu’il va rejoindre le pénitencier «Administrave Maximum Facility Florence » (surnommé l’« Alcatraz des Rocheuses ») au Colorado qui héberge déjà des barons de la drogue dont les Mexicains Joaquin « El Chapo » Guzman et l’ancien ministre de la sécurité publique Genaro García Luna, des terroristes et des criminels jugés comme les plus dangereux par les autorités américaines.
Le procureur général des États-Unis, Merrick Garland, a déclaré dans un communiqué que la peine de 45 ans montrait que la nation tiendrait les chefs de file criminels responsables « peu importe où ils se trouvent et peu importe le temps que cela prend » pour avoir « fait du mal aux Américains ».
L’extradition vers les États-Unis est la hantise des criminels latino-américains car, si les prisons de leur propres pays sont pour le moins très perméables, ce n’est pas le cas aux USA où ils risquent d’être mis totalement à l’isolement pendant des années.
Durant des décennies, la vie de presque tous les Colombiens a été touchée par le conflit multiforme du pays. Un méli-mélo de guérillas de gauche, de groupes paramilitaires de droite, de narcotrafiquants et d’autres bandes de criminels se sont fait la guerre pour le contrôle de régions montagneuses du pays. Selon les données du bureau gouvernemental d’aide aux victimes colombien, la violence a coûté la vie à plus d’un million de personnes et en a laissé des millions d’autres déplacées de force, disparues et autrement blessées.
Le gouvernement a cherché à signer des accords de paix avec les groupes armés mais a le plus grand mal à les consolider dans un conflit complexe enraciné dans la pauvreté rurale et le manque d’opportunités pour la jeunesse.
Plus globalement, l’ensemble de l’Amérique latine continue à être une zone où les criminels règnent en maîtres. Ceux qui n’acceptent pas la corruption sont éliminés. Ainsi, le candidat à la présidentielle équatorienne Fernando Villavicencio, deuxième dans les sondages, a été assassiné par balles à la fin d’un meeting électoral le 9 août.
La semaine précédente, M. Villavicencio avait fait état de menaces contre lui et son équipe de campagne, prétendument adressées par José Adolfo Villamar alias « Fito », le chef du gang des « Choneros » (2) actuellement incarcéré.
Le 29 juillet, Pablo Eduardo Casañas Calzada, le directeur de la prison où est incarcéré Miguel Àngel Treviño Morales alias « Z40 » arrêté en 2013 mais qui dirige toujours son organisation depuis sa cellule, a été assassiné par balles à Mexico.
Mais la raison principale de la situation catastrophique de l’Amérique latine créée par le trafic de drogue est que la clientèle mondiale – et particulièrement occidentale – est toujours demandeuse et prête à payer le prix fort pour sa consommation…
1. Voir : « COLOMBIE. Arrestation d’une figure du trafic de drogue » du 26 octobre 2021.
2. Voir : « ÉQUATEUR. Nouveau hub de la cocaïne » du 17 août 2022.
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