Le 5 octobre, une nouvelle tuerie a eu lieu à San Miguel Totolapan au nord de l’État de Guerrero, dans la région surnommée « Tierra caliente » aux confins du Michoacán et de l'État de Mexico (la grande périphérie de la capitale).

Conrado Mendoza Almeda, le maire de la ville, et son père – également ancien maire et ex-président de la région, Juan Mendoza Acosta – font partie des 18 victimes de cette violente attaque lancée simultanément contre le palais municipal et le domicile de Mendoza Acosta. Sept policiers municipaux ont également trouvé la mort lors de cette opération.
Cette région est connue pour son attrait touristique (Acapulco) et pour la violence des cartels qui se disputent les territoires riches en culture du pavot. Elle fut un fief de la Familia Michoacana lais ce cartel est en perte de vitesse depuis une scission interne qui a amené à la création des « Caballeros Templarios ». Ces derniers, fortement étrillés ces dernières années, se retrouveraient au sein du gang « Los Viagras ».

L’attaque serait le fait d’un groupe « Los Tequileros » qui semblait être en retrait depuis la mort en février 2018 de son chef Raybel Jacobo de Almonte « El Tequilero » ( le buveur de Tequilla d’où le nom de son groupe) – mais qui avait récemment prévenu qu’il allait revenir à San Miguel Totolapan. En fait, les sicarios de ce groupe travailleraient pour le Cartel Jalisco Nueva Generacion (CJNG), le plus puissant du Mexique qui tente d’étendre son influence dans toute la région(1).

Tous ces groupes criminels ont des contacts (voir plus si « affinités ») avec les autorités locales. Un observateur local affirme même : « nous avons une série de seigneurs de guerre, de narco-trafiquants qui contrôlent la zone. Les partis, au lieu de combattre ces structures, se sont appuyés sur eux pour gagner les élections ».

Selon le cabinet de conseil Etellekt, cette attaque porte à 94 le nombre de maires assassinés au Mexique depuis 2000. Plus de 300.000 personnes ont été tuées ou ont « disparu » au Mexique depuis 2006, le début de la « guerre de la drogue ».
Cette opération a été lancée un jour après l’approbation par le Sénat d’une loi controversée permettant à l’armée de participer à des opérations de sécurité publique jusqu’en 2028. Le problème est que les policiers locaux et même nationaux sont corrompus. L’armée est pour sa part plus « sûre » sans être totalement exempte de cas litigieux.

Note de l’auteur. Pour tout analyste qui s’intéresse à l’actualité internationale, il reste étonnant de voir l’importance accordée au nombre des malheureuses victimes en Ukraine (selon les autorités de Kiev, une dizaine de tués le 10 octobre pour 83 missiles lancés) alors que les medias ne font que très peu d’écho pour les « tués ailleurs » en général(2) et en Amérique latine en particulier (18 dans le cas exposé dans cet article). Il est vrai que la menace russe semble proche alors que le Mexique paraît bien lointain. C’est une erreur fondamentale car les Organisations criminelles transnationales – OCT – (dont les cartels mexicains représentent une importante pièce du puzzle) constituent un danger fondamental pour les sociétés occidentales. Au niveau individuel, en France, chaque citoyen court beaucoup plus de risques de croiser un criminel lié de près ou de loin aux OCT qu’un spetsnaz russe. La lutte contre le crime organisé devrait être la priorité sécuritaire pour les autorités.

1. Voir : « Mexique : le cartel de Jalisco nouvelle génération met en œuvre une nouvelle stratégie » du 2 septembre 2021.
2. Par exemple en Afrique et au Sahel.

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Texte

Alain Rodier

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